Les 18-24 ans délaissent les médias
traditionnels
Certains les croyaient apathiques, indifférents au
monde qui les entoure. Erreur. Une bonne partie des 18-24 ans
mordent à pleines dents dans l'actualité. Ils ont
tellement d'appétit, d'ailleurs, que le menu concocté
par les médias traditionnels, les stations de télévision,
les journaux à grand tirage, les laisse sur leur faim.
Trop de faits-divers, soulignent ces boulimiques des nouvelles
à saveur sociale, pas assez d'informations internationales
et environnementales.
Une vue partielle des rapports que les jeunes Canadiens et Canadiennes
entretiennent avec l'information? Bien sûr. La recherche
que le Centre d'étude sur les médias de l'Université
Laval et le Consortium canadien de recherche sur les médias
ont confié à l'INRS-Culture et Société
ne prétend pas être exhaustive. D'autant plus que
les jeunes de cette tranche d'âge ne constituent pas un
groupe monolithique. Cependant, cette étude a le mérite
de battre en brèche quelques préjugés qui
courent dans un monde de l'information qui depuis quelques années
assiste impuissant à l'érosion constante de son
jeune auditoire. "Il faut absolument que les médias
se réajustent pour attirer les 18-24 ans, et pas seulement
en utilisant des mises en pages attrayantes et colorées,
remarque Florian Sauvageau, professeur au Département
d'information et de communication. Au contraire, le fait d'avoir
recours à de tels moyens en rebute plusieurs qui ont l'impression
qu'on leur présente l'information en bande dessinée."
Une saine méfiance
Pour mener à bien leur enquête, les chercheurs
de l'INRS Urbanisation, Culture et Société ont
interrogé 70 Canadiens et Canadiennes de 18 à 24
ans, tant francophones qu'anglophones, à Vancouver, Toronto
et Montréal. D'un bout à l'autre du pays, la méfiance
envers les médias semble assez généralisée.
"Selon ces jeunes, l'information n'est pas assez objective,
elle n'offre pas toutes les diversités d'opinion, précise
l'agente de recherche à l'INRS Claire Boilly. Parmi ceux
qui sont le plus scolarisés et intéressés,
beaucoup considèrent que les médias orientent leur
contenu pour avoir un effet persuasif." Plusieurs soulignent
ainsi le parti pris des médias envers l'allégeance
souverainiste ou fédéraliste, mais surtout le rôle
joué par la concentration de la presse écrite et
télévisuelle dans le choix du contenu informatif.
Pour les chercheurs, cette méfiance des jeunes envers
le monde de l'information rappelle celle qu'ils entretiennent
envers les lieux de pouvoir et les institutions politiques. Nombreux
sont les jeunes lecteurs qui se tournent alors vers des sources
informatives alternatives, qu'il s'agisse de journaux ou de sites
Internet pour compléter leurs connaissances. Ou encore
qui lisent des livres spécialisés sur les questions
qui les intéressent. Une grande partie de leur information
passe aussi par la socialisation, a constaté Madeleine
Gauthier, professeure à l'INRS Urbanisation Culture et
Société. "L'information circule beaucoup à
travers les relations interpersonnelles. Il y a même une
sorte de pression sociale à se tenir au courant au sein
du groupe, un phénomène qui n'avait jamais été
vraiment mis en lumière jusque-là."
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