
Un saut quantique
Une équipe du CRBF lève le
voile sur la moitié du génome de l'épinette
blanche
"Un jalon important dans l'histoire de la génétique
forestière canadienne et internationale." "Un
fait marquant de l'histoire de la recherche forestière
québécoise, canadienne et internationale ainsi
que de la génomique canadienne non médicale."
"Le premier grand catalogue de gènes pour une espèce
forestière canadienne." C'est en ces termes aussi
enthousiastes que solennels que Jean Bousquet décrit l'article
que vient de publier une équipe du Centre de recherche
en biologie forestière (CRBF) dans un récent numéro
de la revue scientifique BMC Genomics. Le jalon auquel
ce professeur fait référence est le séquençage
de 16 500 gènes de l'épinette blanche et la détermination
des fonctions de 68 % de ceux-ci, réalisés par
Nathalie Pavy, Janice Cooke, Étienne Noumen, Carine Guillet-Claude,
Jean Bousquet et John MacKay du CRBF, et par 15 autres chercheurs
canadiens et américains.
"Jusqu'à tout récemment, on connaissait à
peine quelques centaines de gènes de l'épinette
blanche, explique le leader du projet Arborea, John MacKay. En
deux ans, nous en avons séquencés des milliers.
C'est un saut quantique pour cette espèce." Le chercheur
attribue cette percée à deux éléments:
d'une part, à la mise au point de nouvelles technologies
de séquençage à haut débit, et, d'autre
part, à un haut débit de financement en provenance
de Génome Canada et Génome Québec. Ces deux
organismes viennent d'ailleurs d'investir 11,8 M $ dans la poursuite
des travaux.
L'épinette blanche compte entre 30 000 et 40 000 gènes,
soit autant que l'homme. Par contre, son génome contient
trois fois plus de matériel génétique en
raison de l'abondance des régions non codantes, ce qui
complique le travail de séquençage. Pour contourner
ce problème, les chercheurs ont utilisé les ARN
messagers, des molécules produites à partir des
gènes qui codent pour des protéines. Les ARN messagers
sont repêchés de façon aléatoire de
sorte que les plus abondants ont plus de chances de tomber dans
les filets des chercheurs. "Le séquençage
de la deuxième moitié du génome de l'épinette
blanche risque d'exiger plus de travail que la première
parce qu'il faut trouver les ARN messagers plus rares",
souligne John MacKay.
L'équipe d'Arborea a déposé le fruit de
son patient travail dans des bases de données publiques
ainsi que dans son propre site Web (www.arborea.ulaval.ca). "Nous
rendons ces données accessibles à tous les chercheurs
de façon à faire progresser les connaissances en
génomique forestière, explique John MacKay. Comme
la Commission Coulombe l'a souligné, nos connaissances
fondamentales de la génétique des arbres sont encore
trop limitées."
Le professeur MacKay et ses collègues espèrent
que leurs travaux serviront à améliorer certaines
caractéristiques des arbres, de façon à
rendre l'industrie forestière canadienne plus compétitive.
Dans le cadre de la phase 2 du projet Arborea, ils tenteront
d'ailleurs d'identifier des marqueurs grâce auxquels il
sera possible de sélectionner des épinettes dotées
de qualités intéressantes sur le plan de la qualité
du bois et de la croissance. "Présentement, il faut
faire pousser un arbre pendant plus de 20 ans avant de pouvoir
se prononcer sur ses qualités. Grâce aux marqueurs
génétiques que nous allons identifier, nous pourrons
être fixés dès la première année
de vie de l'arbre."

|
|