Regards et jeux dans l'espace Les oeuvres des diplômés de l'École des arts visuels s'affichent dans des galeries de Québec et de Montréal À quelques jours d'intervalle, Chantal Séguin, Samuel Roy-Bois et Nathalie Thibault, trois diplômés de l'École des arts visuels. ont vécu les affres du montage de leur exposition avant d'en fêter le vernissage. Autre similitude, le hasard veut que les trois artistes s'intéressent à l'architecture. Leurs installations respectives interrogent donc les liens entre l'art et les constructions dans l'espace. Chantal Séguin, par exemple, s'approprie jusqu'au 13 novembre la galerie d'Engramme avec "L'avenir est plus loin qu'on pense". Dans cette salle vitrée au bout de la côte d'Abraham, elle a créé un paysage imaginaire. Comment? Tout simplement en utilisant des constructions en bois aux allures de maquettes, ouvertes aux quatre vents à l'arrière-plan, tandis qu'au premier plan des tables basses en bois peint ressemblent à de petites maisons. "Au début, je voulais construire une ville, explique la jeune fille inscrite à la maîtrise en arts visuels. Puis, les réseaux de murs ont fini par faire naître un motif et j'ai travaillé la construction comme une image dans un tableau." Chantal Séguin a donc varié la couleur de ses maquettes, leur échelle, leur forme, en pensant aux pigments qu'on étend sur une toile. Dans certaines de ses constructions, des panneaux de verre divisent l'espace et servent de supports à des silhouettes en sérigraphie. Une façon pour l'artiste, qui a déjà réalisé plusieurs oeuvres d'art dans des bâtiments neufs ou fraîchement rénovés, de mieux intégrer l'art à l'architecture. Elle rêve ainsi un jour de bâtir des divisions de verre dans un édifice encore en travaux, pour que l'art fasse vraiment partie de la vie quotidienne de ses habitants.
De son côté, Nathalie Thibault, qui a terminé sa maîtrise en arts visuels il y a quelques mois, a conçu son installation spécifiquement pour la petite galerie de l'il de poisson. Jusqu'au 13 novembre, ses "errances affectives à caractère pictural" occupent toute la pièce. C'est d'abord sa construction recouverte de gypse qu'on découvre et le mur peint de plusieurs couleurs fait de bardeaux d'asphalte qui lui fait face. "J'ai cherché une structure contraignante pour changer ma façon de travailler, moi qui, d'habitude, peins sur toile, explique-t-elle. J'ai donc procédé par intuition, en peignant ou grattant les bardeaux, sans savoir à l'avance quelle couleur j'allais utiliser. Je cherche la liberté dans le geste de peindre; l'histoire se construit au gré des errances." Cette murale chargée de vécu fait contraste avec la cloison en gypse lisse, et ainsi s'établit un dialogue entre les deux surfaces, tout en suggérant au visiteur de regarder l'espace de la petite galerie d'un il neuf. Samuel Roy-Bois a lui aussi inventé un nouvel espace dans la galerie de Quartier éphémère, à Montréal, où il expose son installation, sa sculpture et ses dessins jusqu'au 20 novembre. L'île creuse, en hommage à l'île d'Utopie de Thomas More, accueille les visiteurs dans un monde bien contrôlé. Ce diplômé du baccalauréat (1996) à l'Université Laval qui a poursuivi ses études à Montréal a bâti une pièce entièrement fermée, recouverte de matériaux isolants pour mieux conserver la fraîcheur intérieure diffusée par un climatiseur. Déposé sur une pile d'objets fonctionnels bien rangés, un four micro-ondes, une chaise et une étagère, ce cube vide évoque notre désir bien contemporain de repli sur soi. "J'ai voulu construire un espace d'isolement, d'exclusion, un univers en retrait qu'on peut contrôler, explique l'artiste aujourd'hui installé à New-York. C'est confortable, mais en même temps un peu bizarre." C'est justement ce décalage entre une architecture d'apparence banale et le côté étrange de ses oeuvres qui l'intéresse. Une démarche que le jeune homme poursuit dans ses dessins d'immeubles rigides un peu froids, réalisés sur du papier tâché. Ou encore avec sa conduite d'air dont les vitres laissent voir des objets éphémères comme du pain, des orchidées. Un univers à découvrir. À noter que Samuel Roy-Bois expose en mai 2006 au Musée d'art contemporain de Montréal pour la première fois. Chantal Séguin, jusqu'au 13 novembre, Engramme, 501 Saint-Vallier Est, de 12 h à 17 h du mercredi au dimanche. Nathalie Thibault, jusqu'au 13 novembre, l'il de poisson, 580 côte d'Abraham, du mercredi au dimanche, de 12 h à 17 h. Samuel Roy-Bois, jusqu'au 20 novembre, Quartier éphémère, Fonderie Darling, 745 rue Ottawa à Montréal, du mercredi au dimanche de 12 h à 20 h. | |