
Chimio, radio, boulot
Au fil des ans, les femmes qui ont eu un cancer
du sein ne s'absentent pas plus du travail que leurs consoeurs
Trois ans après leur maladie, les femmes qui ont eu
un cancer du sein ne s'absentent pas davantage du boulot que
les autres travailleuses québécoises, révèle
une recherche publiée par une équipe de la Faculté
de médecine dans l'édition du 27 septembre du Canadian
Medical Association Journal. L'étude réalisée
par Mélanie Drolet, Elizabeth Maunsell, Myrto Mondor,
Chantal Brisson, Jacques Brisson, Benoît Mâsse et
Luc Deschênes, de l'Unité de recherche en santé
des populations, constitue la première analyse détaillée
jamais réalisée dans le monde sur l'impact du cancer
du sein sur l'absence du travail.
Les chercheurs ont interrogé 646 femmes de 18 à
59 ans qui avaient eu un cancer du sein et 890 travailleuses
épargnées par cette maladie, afin d'établir
dans quelle mesure le cancer du sein contribue à l'absence
du travail pour une période d'au moins quatre semaines
consécutives. Ce n'est que pendant l'année qui
suit le diagnostic que les chercheurs ont noté une différence
entre les deux groupes. En raison de la chirurgie et des traitements
de radiothérapie et/ou chimiothérapie, 85 % des
femmes du groupe cancer s'absentent pour plus de 4 semaines (durée
moyenne: 5,6 mois) contre 18 % dans le groupe témoin (durée
moyenne: 1,7 mois). Cette différence s'estompe pendant
la deuxième année et elle disparaît complètement
lors de la troisième année qui suit le diagnostic,
si on exclut les cas de récidives du cancer. "C'est
rassurant pour les femmes qui ont eu un cancer du sein, et pour
les employeurs également, de constater que, trois ans
après le diagnostic, elles ne s'absentent pas plus que
les autres travailleuses québécoises et que cet
épisode de leur vie est maintenant derrière elles",
commente Elizabeth Maunsell.
Toutes les travailleuses ne sont pas égales face au cancer
du sein, suggèrent d'autres résultats de l'étude.
Ainsi, une proportion significative de femmes ne s'absentent
pas pour une période de quatre semaines ou plus pendant
la première année, même si elles doivent
subir une chirurgie et recevoir des traitements adjuvants. Ces
femmes représentent 2 % des travailleuses syndiquées,
15 % des travailleuses non syndiquées et 34 % des travailleuses
autonomes interrogées lors de l'enquête. "L'option
de s'absenter du travail après un diagnostic de cancer
du sein semble moins accessible aux travailleuses non syndiquées
et aux travailleuses autonomes, souligne la chercheure. On ignore
pour l'instant si cela a un impact sur leur retour à la
santé." Elizabeth Maunsell relève au passage
que 74 % des femmes du groupe cancer se sont absentées
du travail pour une période dépassant les 15 semaines
d'assurance-emploi prévues pour cause de maladie.
"D'un point de vue humaniste, ces disparités sont
injustes, reconnaît-elle, mais ce n'est pas une situation
exclusive au cancer du sein. C'est également le cas pour
toutes les maladies dont le traitement est long. Il ne faut pas
chercher à faire des règles générales
qui s'appliqueraient à toutes les travailleuses car certaines
veulent reprendre le travail rapidement parce qu'elles se sentent
mieux ainsi. Il me semble qu'il faudrait plutôt chercher
la meilleure façon d'aider chaque personne à passer
à travers cette épreuve", propose-t-elle.
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