
Créations collectives
Huit étudiants étrangers
ont affiché leurs couleurs au bout d'un tunnel gris
par Renée Larochelle
Si vous passez par le couloir souterrain reliant le pavillon
Alphonse-Marie-Parent au pavillon Biermans-Moraud, là
où la grisaille du quotidien rattrape généralement
l'humeur du promeneur solitaire, il y a de fortes chances pour
que votre attention soit attirée par des peintures murales
à caractère franchement exotique. En effet, depuis
le 30 mai, et jusqu'au 26 août, huit étudiants étrangers
provenant de sept pays ont sorti leurs pinceaux, déployant
leur créativité et leur imagination afin de donner
à l'endroit un caractère plus humain. Initié
par le Service des résidences, en collaboration avec le
Service de placement et le Service des immeubles, ce projet s'inscrit
dans le cadre du 50e anniversaire du Service des résidences
de l'Université.
"C'est ce qu'on appelle faire d'une pierre deux coups, explique
Françoys Bédard, coordonnateur au Service des résidences
et superviseur du projet. D'une part, ces jeunes étudiants
étrangers ont bénéficié d'un emploi
d'été payé qu'ils n'auraient pu avoir autrement,
puisqu'ils ne peuvent pas travailler à l'extérieur
de l'Université, à cause de leur statut. D'autre
part, leur travail a eu pour effet d'améliorer l'aspect
d'une partie du paysage souterrain reliant le Parent au Moraud.
Il sera donc beaucoup plus agréable de passer par les
lieux."
Expression libre
Si au début du projet, la composition des peintures
murales devait avoir un lien avec le 50e anniversaire du Service
des résidences, les choses ont changé en cours
de route, les étudiants ayant choisi en quelque sorte
de s'exprimer plus librement et d'explorer leurs propres avenues
artistiques. Cependant, pour ne pas passer sous silence cet important
anniversaire, ils y sont allés d'une création collective
dédiée au Service des résidences, où
figurent notamment tous les drapeaux de tous les pays d'origine
des étudiants étrangers ayant habité les
différentes résidences de l'Université depuis
un demi-siècle (voir la photo de la page couverture).
Deux logos du 50e anniversaire réalisés par le
groupe attirent également l'attention.
"Il n'y a pas eu une seule journée sans qu'une personne
ne vienne s'informer ou s'intéresser à ce que nous
faisions, révèle "l'artiste" du groupe,
Alejandro Ignacio Petrivonic Huth. Étudiant en architecture,
le jeune homme est en effet le seul membre de l'équipe
à étudier dans un domaine relié aux arts.
Sa peinture représente les pavillons Parent et Moraud,
avec en leur centre un "nouvel homme" amené
par un oiseau. Plus bas, le jeune homme a peint quelques plantes
spécifiques à la faune de son pays, le Chili. Originaire
de Madagascar, Antsasoa Rivotiana a choisi de dessiner la carte
de son pays et d'attirer l'attention sur des aspects méconnus
de ce coin du globe. "Si je peux inciter les gens à
voyager chez nous, j'aurai atteint mon but", explique cette
étudiante en économie rurale. Mohamed Amine Ben
Maâcha, étudiant tunisien en génie mécanique,
a choisi l'abstraction pour représenter une ville arabe,
tandis que son compatriote, Kamel Meddi, a peint un quartier
typique de Sidi-Bou-Said, village pittoresque de la Tunisie.
Beau et chaud
Quand on demande aux étudiants si travailler trente
heures par semaine dans un couloir souterrain ne leur a pas semblé
trop difficile, la réponse ne se fait pas trop attendre.
"C'était un peu chaud parfois mais lors de certains
jours de canicule, il faisait beaucoup plus frais à l'intérieur
qu'à l'extérieur", dit Denise Ibanez Martinez,
étudiante en économie et auteure d'une murale représentant
une figure féminine marquante de son Mexique natal, la
"Catrina". Même son de cloche du côté
de Cheikh Mame Ibra Ngom, qui a bien aimé son expérience
souterraine, choisissant de faire connaître deux monuments
marquants de l'histoire de l'esclavage du Sénégal.
Dans cet esprit, Gilbert Niyomugabo, qui n'a pas mis les pieds
au Rwanda depuis près de quinze ans, a peint une femme
seule avec son enfant, dans un pays dévasté par
la guerre.
Le mot de la fin revient à Dia Sanou, du Burkina Faso.
"Au départ, je considérais cet emploi comme
une activité pour meubler mes vacances. Au fil de l'été,
j'y ai toutefois pris goût et j'ai eu la chance de m'exprimer
à travers la création artistique. Dans compter
que cela m'a permis de me faire des amis très sympathiques."

|
|