
Deuxième mission dans l'Arctique
L'équipage du navire de recherche Amundsen
y étudie l'impact du réchauffement climatique sur
l'écosystème marin
C'est dans un concert de cornes de brume que le navire de
recherche océanographique Amundsen a levé l'ancre
à Québec, le 5 août, pour une seconde mission
scientifique de trois mois. Cette mission se déroule dans
le cadre des activités du Réseau de centres d'excellence
canadien ArcticNet. Cap vers l'Arctique maritime canadien pour
les 42 scientifiques à bord, dont une quinzaine de chercheurs,
étudiants et stagiaires post-doctoraux de l'Université
Laval. "C'est le temps ou jamais de prendre le pouls de
l'Océan arctique pour ne pas manquer la phase exponentielle
du réchauffement du climat", explique Louis Fortier,
grand responsable du projet CASES (Canadian Arctic Shelf Exchange
Study), directeur de Québec-Océan et professeur
au Département de biologie de l'Université Laval.
"La première mission de l'Amundsen nous a
permis de voir l'état du patient, cette fois, il s'agit
plutôt d'un suivi."
Au cours de leur voyage, les scientifiques vont donc mettre en
place des observatoires permanents dans trois régions
océaniques clés, les Eaux du Nord, la Mer de Beaufort
et la Baie d'Hudson, tout en prélevant également
des échantillons de glace. Un quatrième site d'observation
s'ajoute: la mer de Laptev, dans l'Arctique sibérien,
où Louis Fortier se rend début septembre en compagnie
d'une équipe de chercheurs américains, canadiens
et russes. Une fois installés, les équipements
vont fournir des données pendant plusieurs années
aux scientifiques qui les relèveront à chacun de
leurs passages. Il s'agit d'une série d'appareils fixés
sur un câble ancré au fond, maintenus à la
verticale grâce a des bouées en verre, et placés
à une profondeur de 30 à 200 mètres selon
les conditions de glace et la présence d'icebergs dans
la région.
Plus de 200 chercheurs d'une dizaine de pays participent
aux travaux menés à bord de l'Amundsen. Dirigé
par l'Université Laval, ce projet constitue la plus importante
mission scientifique canadienne jamais réalisée
en océanographie arctique.
Comme le précise Martin Fortier, directeur exécutif
d'ArticNet, l'expédition permettra de mettre en place
quatre types d'appareils. Deux courantomètres mesurent,
par exemple, la vitesse et la direction des courants marins,
la température, la conductivité (donc la salinité),
la profondeur, la turbidité, l'oxygène dissout
à une profondeur précise ou sur une longue colonne
d'eau. Les pièges à particules, quant à
eux, recueillent des restes de phytoplancton, de zooplancton
mort, de pelotes fécales, ainsi que du sable et des sédiments.
Ces prélèvements devraient s'effectuer sur une
durée de une à quatre semaines afin de dresser
une série temporelle du flux de carbone organique et inorganique
durant la période couverte par le mouillage. Par ailleurs,
les scientifiques vont mettre en place des hydrophones afin d'enregistrer
les vocalisations des mammifères comme les phoques, les
morses, les bélugas. Véritables espions sous-marins,
ces micros observeront les déplacements des animaux puisqu'on
soupçonne que la fonte du couvert de glace et le passage
plus fréquent des bateaux dans cette zone pourraient avoir
des conséquences sur leurs habitudes de vie.
Les chercheurs relèveront toutes ces données lors
d'une prochaine mission scientifique l'an prochain. Ils croiseront
ces données avec des observations par satellite sur l'épaisseur
de la glace. Une fois analysées, elles donneront de précieuses
indications aux chercheurs sur la manière dont le climat
évolue. "Il nous faut vérifier si les modèles
de réchauffement de la planète élaborés
jusqu'à présent sont timorés ou exagérés,
précise Louis Fortier. En fait, il semble que les prévisions
les plus alarmistes sont les plus proches de la réalité."
ArticNet prévoit déployer de nouveaux observatoires
automatisés dans les années à venir, tout
en relevant de façon annuelle les données des équipements
déjà existants. L'Amundsen repartira donc en mission
chaque année pour quelques mois jusqu'en 2011. Il est
également question d'une expédition d'un an autour
de 2007-2009, à l'occasion de l'Année internationale
polaire.
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