
Les sentinelles de l'air
Une équipe du Centre de recherche de
l'Hôpital Laval raffine l'usage d'un appareil de détection
pour armes bactériologiques
Une équipe du Centre de recherche de l'Hôpital
Laval vient de raffiner l'interprétation qu'on peut faire
des données obtenues à l'aide un appareil de détection
pour armes bactériologiques, développé par
le ministère de la Défense nationale. Christian
Laflamme, Daniel Verreault, Sophie Lavigne, Luc Trudel et Caroline
Duchaine, du Centre de recherche de l'Hôpital Laval, et
leur collègue Jim Ho, de la Défense nationale,
ont établi l'existence d'un lien étroit entre la
viabilité d'une bactérie et sa fluorescence intrinsèque.
Dans le numéro de mai de la revue scientifique Frontiers
in Bioscience, ces chercheurs rapportent que les bactéries
qui deviennent très fluorescentes après avoir été
exposées à un rayonnement ultraviolet sont dotées
d'une plus grande viabilité que les bactéries peu
fluorescentes, et que, conséquemment, elles pourraient
poser un plus grand risque pour la santé humaine. Les
causes de cette variation dans la fluorescence intrinsèque
des spores bactériennes sont inconnues pour l'instant.
Cette démonstration constitue un appui de taille à
une technologie développée par des chercheurs de
la Défense nationale qui ont mis au point un appareil
servant à détecter dans l'air ambiant la présence
de bactéries utilisées comme armes biologiques.
L'appareil en question, le FLAPS (séparateur granulométrique
aérodynamique à fluorescence) permet de repérer
instantanément la présence de spores de bactéries
dotées de fluorescence intrinsèque. Il restait
cependant à établir que les spores fluorescentes
constituaient une plus grande menace pour la santé humaine,
ce que l'équipe de la professeure Caroline Duchaine vient
de faire. Son équipe de recherche a découvert que
les bactéries très fluorescentes sont 1,7 fois
plus promptes à se multiplier lorsqu'on les place dans
un milieu de culture approprié et qu'elles possèdent
aussi d'autres caractéristiques cellulaires qui témoignent
d'une plus grande viabilité que les bactéries peu
fluorescentes.
La Défense nationale recourt au FLAPS pour suivre en temps
réel l'évolution des concentrations de spores de
bactéries dans l'air ambiant de façon à
protéger la santé de troupes déployées
en territoire hostile contre d'éventuelles attaques bactériologiques.
"Le défi consiste à détecter très
rapidement la présence de spores de bactéries dangereuses
alors que l'air contient des millions de spores, certains vivantes
et d'autres mortes, explique Caroline Duchaine. Il serait fastidieux
de cultiver toutes ces bactéries in vitro et surtout
beaucoup trop long pour réagir adéquatement à
ce qui pourrait être une attaque bactériologique
par aérosol. En déterminant la concentration de
bactéries dans l'air et leur viabilité, on peut
mieux apprécier le risque pour la santé humaine
et réduire les alarmes inutiles."
Caroline Duchaine précise que le FLAPS ne permet pas déterminer
si les bactéries présentes dans l'air sont pathogènes,
comme celles qui causent l'anthrax par exemple, ou si elles sont
inoffensives. "Ce que l'appareil recherche, c'est une élévation
brusque et anormale du nombre de spores de bactéries dans
l'air, qui pourrait correspondre à une attaque bactériologique.
Maintenant, en plus de connaître la concentration de spores
de bactéries dans l'air, nous avons une meilleure appréciation
de leur viabilité et du risque qu'elles posent pour la
santé humaine."
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