
Dans la peau des réfugiés
Une quarantaine d'étudiantes et
d'étudiants ont participé, durant 24 heures, à
la simulation d'un camp de réfugiés sur le campus
par Yvon Larose
L'attente, l'inconnu, le sentiment d'impuissance, la peur,
la violence morale et la perte de dignité, voilà
ce qu'ont vécu et ressenti une quarantaine d'étudiantes
et d'étudiants qui participaient bénévolement
à une reconstitution de camp de réfugiés,
les 8 et 9 avril, sur le campus. Cette activité de 24
heures, une première au Canada, se voulait l'élément
central d'un événement de sensibilisation de trois
jours présenté par la délégation
Droits et démocratie de l'Université Laval et intitulé
"Sur la piste des réfugiés". Pour l'occasion,
un camp de réfugiés, inspiré d'un document
de la Croix-Rouge, avait été aménagé
sur l'avenue des Sciences humaines, entre les pavillons Alphonse-Desjardins
et Jean-Charles-Bonenfant. Les participants ont pu vivre le quotidien
des réfugiés après avoir été
pris en charge par des représentants de la Croix-Rouge,
du Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés
(HCR) et de Médecins du monde. Les Forces armées
canadiennes avaient apporté leur concours en érigeant
une demi-douzaine de tentes. Un périmètre de sécurité
avait été établi, notamment pour faire vivre
le sentiment d'enfermement qui caractérise ce type d'endroit.
Le scénario allait comme suit. Des citoyens de la république
fictive du Kadjarih se sont enfuis de leur pays déchiré
par une guerre civile. Leur exil les conduit dans un pays voisin
où ils sont pris en charge par les ONG nommées
plus haut dans un camp qu'elles ont aménagé. "Les
réfugiés ont ressenti une perte de dignité
en traversant le boisé qui représentait le périmètre
consacré à l'exil, explique Delphine Soétart,
étudiante à la maîtrise en études
internationales et coordonnatrice de l'événement.
D'autres étudiants bénévoles, une vingtaine
au total, jouaient le rôle soit de soldats du Kadjarih,
de rebelles ou de contrebandiers qui pouvaient soit aider, soit
nuire aux réfugiés. La violence était davantage
dans le regard et la posture que dans le geste. Elle était
morale et verbale. C'était de l'intimidation."
Une fois au camp, les réfugiés se sont enregistrés
et ont reçu des couvertures et de la nourriture. Ils se
sont installés et se sont fait à manger. Ensuite,
ils n'ont rien fait d'autre qu'attendre. La nuit venue, ils se
sont fait surprendre dans leur sommeil par la milice du Kadjarih
venue chercher deux rebelles considérés comme des
traîtres et qui s'étaient cachés parmi eux.
Au matin, une réfugiée, qui allait chercher de
l'eau pour préparer le repas, est entrée accidentellement
dans un champ de mines antipersonnel et a été blessée.
L'activité a pris fin avec le retour des réfugiés
dans leur pays. Ce retour était organisé par le
HCR, après l'annonce d'un cessez-le-feu au Kadjarih et
d'accords de paix en cours. Ensuite, quelque 200 personnes ont
pu faire une visite guidée du camp.
Pour comprendre les enjeux
L'événement "Sur la piste des réfugiés"
est né d'une initiative étudiante. Il a nécessité
une année de préparation pour Pauline Boinot, Isabelle
Jetté, Pascale Labbé, Mireille Ouellet, Myriam
Paquette-Côté et Delphine Soétart, toutes
des étudiantes à la maîtrise en relations
internationales. Le but de l'exercice consistait à faire
comprendre au grand public les enjeux qui, l'an dernier, ont
concerné plus de 40 millions de réfugiés
et de personnes déplacées de par le monde. Toutes
ces personnes avaient en commun le fait d'avoir dû quitter
leur milieu de vie normal parce que leur intégrité
physique et psychologique était menacée. En 2004,
environ 25 000 réfugiés ont élu domicile
au Canada. Dans l'avant-midi du vendredi 8 avril, quelques personnes,
vivant maintenant au Canada, ont témoigné de leur
expérience de réfugiées au Grand Salon du
pavillon Maurice-Pollack. "Ces personnes étaient
originaires du Burundi, du Cambodge et du Congo, indique Delphine
Soétart. De nombreux participants à la simulation
étaient présents. Ils ont commencé à
entrer dans leur rôle à ce moment-là."
La plupart des activités se sont tenues à l'Agora
du pavillon Alphonse-Desjardins. Pendant trois jours, un forum
d'information a permis d'en apprendre davantage sur, entre autres,
le droit international humanitaire et la gestion des camps de
réfugiés. La Croix-Rouge canadienne, le HCR et
Médecins du monde occupaient chacun un stand. Une exposition
de photos était consacrée aux enfants vivant dans
des camps de réfugiés palestiniens au Liban. Une
conférence, une pièce de théâtre et
deux tables rondes étaient également au programme.
Les tables rondes portaient sur la réponse humanitaire
face aux personnes réfugiées, et sur les métiers
des travailleurs humanitaires, bénévoles et professionnels.

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