
L'effet papillon
Les oeuvres de la sculpteure Helga Schlitter
percent neige chaque année en avril
par Pascale Guéricolas
Un immense papillon coloré s'est posé devant
l'Institut des nutraceutiques et des aliments fonctionnels (INAF)
de l'Université Laval. Il accueille les visiteurs à
l'entrée de ce bâtiment situé à l'intersection
du boulevard Hochelaga et de l'autoroute Du Vallon, tel le symbole
d'un passeur de vie et de pollen dans la longue chaîne
de la production alimentaire. Fait d'aluminium, ce lépidoptère
baptisé "Force et fragilité" exhibe fièrement
ses trois ailes, dont une entièrement ajourée.
"Cela donne davantage d'équilibre et un aspect magique
qui me plaît bien, explique sa conceptrice, Helga Schlitter.
En plus, la forme rappelle celle du papillon incrusté
dans le sol qui nous guide vers le jardin intérieur à
l'intérieur de l'édifice."
Blotti au cur du pavillon, cet espace ouvert abrite en effet
des arbres en métal d'environ quatre mètres, fabriqués
par la même artiste, qui se mêlent aux féviers
à feuilles jaunes plantés dans un aménagement
paysager qui comprendra peut-être un jour d'autres graminées
si le plan initial se réalise. Chaque sculpture possède
une couleur différente. La première, de teinte
vert cuivré, se compose d'un rectangle d'aluminium surmonté
d'un bouquet de tiges comme le blé ondulant sous la brise
d'été. La deuxième évoque plutôt
l'estragon avec ses feuilles cuivrées et la troisième,
enfin, exhibant plusieurs feuilles mauves, rappelle le laurier,
les fines herbes, la nourriture bien assaisonnée et le
plaisir gustatif. Ces arbres de métal aux couleurs chatoyantes
constituent un peu la marque de commerce d'Helga Schlitter dont
on peut admirer les oeuvres devant plusieurs bâtiments
de Québec, qu'il s'agisse de la fleur géante devant
la nouvelle bibliothèque de Sillery ou des éclats
de couleurs sur la façade de l'église Saint-Esprit
de Limoilou où loge l'École de cirque.
La couleur dans le cur
Installée depuis plus d'une vingtaine d'années
à Québec, cette artiste originaire du Mexique participe
souvent aux concours publics visant à accorder 1 % du
budget de la construction ou de l'agrandissement d'un édifice
à la réalisation d'une oeuvre d'art. D'ailleurs,
cela ne lui déplaît pas de contribuer à colorer
un environnement qu'elle considère un peu terne comparé
à celui de sa patrie d'origine. "La couleur que l'on
trouve dans les sites aztèques, comme celui de Teotihuacan,
m'inspire beaucoup, explique-t-elle. Lorsque j'étais enfant,
nous allions pique-niquer avec l'école dans le temple
de l'oiseau-papillon et nous ramassions des pointes de flèche
qui traînaient là, sans connaître évidemment
leur valeur." Dans son atelier du quartier Saint-Roch, elle
consulte fréquemment des livres et des revues sur les
civilisations qui ont marqué les derniers millénaires
du Mexique ou se réfère aux souvenirs de ses récents
voyages.
Ainsi, à l'occasion d'un séjour dans une école
d'art de Barcelone, en Catalogne, elle a appris à travailler
le verre pour réaliser des mosaïques bigarrées
à la manière du célèbre sculpteur
Gaudi. "Il a complètement révolutionné
cet art en intégrant toutes sortes de matériaux
aux mosaïques, comme des assiettes, des morceaux de pots."
Lorsqu'elle produit pour elle-même, Helga Schlitter crée
d'immenses serpents, des fleurs, des palmiers multicolores faits
de verre collé sur un support en bois. Des oeuvres qui,
malheureusement, ne pourraient supporter une installation extérieure
étant donné la rigueur de nos hivers. Ce sont d'ailleurs
ces conditions climatiques particulières qui ont poussé
l'artiste à opter pour l'aluminium pour le papillon et
les arbres installés à l'INAF. Apparemment, leurs
couleurs peuvent résister à n'importe quelle tempête
pendant plusieurs décennies, voire plus longtemps encore!

|
|