Remous autour du saumon
Qu'il provienne de rivières ou d'étangs
d'élevage, le saumon atlantique ne pose pas de risques
pour la santé humaine
par Jean Hamann
Des chercheurs de la Faculté de médecine ont
jeté un nouveau pavé dans la mare du saumon lors
d'un colloque scientifique qui se déroulait mercredi à
Québec, en présentant des données qui indiquent
que les saumons atlantiques d'élevage ne contiennent pas
plus de polluants que leurs cousins sauvages. La conclusion de
Carole Blanchet, Michel Lucas et Éric Dewailly, chercheurs
à l'Unité de recherche en santé publique
et à l'Institut national de santé publique du Québec,
vient calmer la tempête créée l'année
dernière par une équipe américaine qui avait
découvert des polluants dans des saumons d'élevage.
Ces chercheurs avaient alors conseillé à la population
de limiter la consommation de saumon d'élevage à
un repas par mois ou de lui substituer du saumon sauvage. Leur
étude avait aussi semé le doute et la consternation
chez les consommateurs de gélules d'oméga-3 fabriquées
à base d'huile de saumon.
"L'étude américaine a eu des répercussions
importantes sur le marché du saumon, relate Michel Lucas.
Les ventes de saumon d'élevage ont connu une baisse importante
dans les mois qui ont suivi et les commerçants ont commencé
à retirer la peau et le gras sous-cutané du saumon
qu'ils mettaient sur les tablettes pour rassurer les consommateurs."
Ces chambardements sont survenus en dépit du fait que
l'étude américaine présentait une lacune
importante: elle comparait des spécimens sauvages de saumon
du Pacifique à des spécimens de saumon atlantique
provenant d'étangs d'élevage. "Le saumon atlantique
et le saumon du Pacifique sont deux espèces bien différentes,
insiste Michel Lucas. Ils ont comparé des pommes et des
poires."
L'équipe d'Éric Dewailly a remis les pendules à
l'heure en documentant la charge de polluants de 46 saumons atlantiques
d'élevage et de 10 saumons atlantiques provenant de rivières
québécoises. Leurs analyses montrent que les saumons
d'élevage contiennent autant de dioxines et de furanes,
plus de BPC, mais moins de mercure que leurs cousins sauvages.
Cependant, dans tous les cas, les valeurs maximales observées
se situent plusieurs fois sous la norme recommandée par
les autorités médicales. Les mêmes analyses
effectuées sur des truites arc-en-ciel provenant d'étangs
d'élevage et de milieu naturel ont conduit aux mêmes
conclusions. "Même en prenant sept repas de saumon
ou de truite par semaine, on ne dépasse pas 40 % de la
dose maximale permise", fait valoir Michel Lucas.
L'étude a aussi permis d'établir que les concentrations
en oméga-3 sont comparables chez les saumons sauvages,
les saumons d'élevage et les truites arc-en-ciel d'élevage,
mais trois fois plus faibles chez les truites sauvages. Le professeur
Dewailly et son équipe ont divulgué ces données
lors du colloque "Oméga-3, santé cardiovasculaire
et mentale: les experts se prononcent", organisé
par la Chaire Lucie et André Chagnon pour l'avancement
d'une approche intégrée en santé, qui se
déroulait le 16 mars à Québec.
|
|