Un bleuet tatoué sur le coeur
Entrepreneuriat Laval aide la jeune firme
Novableu à se trouver une talle sur le marché prometteur
des nutraceutiques et des aliments fonctionnels
"On est tombés dans les bleuets tout petits, comme
Obélix dans la marmite de potion magique", lance
Pierre-Luc Simard. À l'image de nombre d'histoires du
Lac Saint-Jean, la boutade d'un des fondateurs de l'entreprise
Novableu, natif de Normandin comme ses deux autres associés,
Jean-Pierre Trottier et Martin Villeneuve, possède un
bon fonds de vérité. Les trois compères
ont en effet passé une grande partie de leurs vacances
estivales dans les bleuetières à cueillir la manne
bleue. Leurs études universitaires terminées, ils
n'ont eu qu'un désir: revenir à leurs premières
amours, armés de leurs toutes nouvelles connaissances,
afin de contribuer à la relance économique d'une
région de plus en plus désertée par les
jeunes. Ils ont en effet décidé de mettre sur pied
une entreprise spécialisée dans le développement
de technologies permettant la mise en valeur des principes actifs
du bleuet sauvage.
L'aventure commence alors que le finissant en physique Pierre-Luc
Simard et le finissant en sciences et technologie des aliments
Jean-Pierre Trottier planchent sur leur maîtrise à
l'Université Laval. Conscients que l'industrie du bleuet
constitue une richesse incroyable et loin d'être totalement
exploitée, les deux amis cherchent une idée de
production sortant de l'ordinaire. "Chez nous, la population
vieillit, rappelle Pierre-Luc Simard. C'est donc à nous
d'essayer de trouver des solutions novatrices permettant d'utiliser
les ressources renouvelables de façon plus efficace et
responsable. L'avenir passe par le développement durable
et les biotechnologies."
Durant plusieurs semaines, Pierre-Luc Simard et Jean-Pierre Trottier
ont donc réfléchi aux nombreuses recettes de confitures,
tartes et autres produits tirés du bleuet dans la production
desquels ils pourraient se lancer, pour finalement réaliser
que leurs connaissances scientifiques leur permettaient d'aller
plus loin. Grâce aux travaux de maîtrise de Jean-Pierre
Trottier portant sur la synthèse de molécules,
les deux amis ont donc commencé à travailler sur
la façon de mettre en valeur les qualités anti-oxydantes
du bleuet, avec l'aide d'Yves Desjardins, professeur au Département
de phytologie et directeur de la formation à l'Institut
des nutraceutiques et des aliments fonctionnels (INAF).
Prise de risque zéro
Dès le départ de leur projet, les deux associés
ont compris la nécessité de développer la
structure administrative de l'entreprise en parallèle
avec le volet plus scientifique. Ils ont donc pris contact avec
Entrepreneuriat Laval qui les a aidés à bâtir
leur plan d'affaires. Ils ont ensuite remporté le premier
prix local du Concours québécois en entrepreneurship,
volet création d'entreprise agroalimentaire. "Au
début, nous avions des grands rêves et des grandes
idées, mais il fallait apprendre à se donner un
plan d'attaque solide et à valider nos intuitions entrepreneuriales
pour les réaliser", raconte Jean-Pierre Trottier.
"Lorsque tu as 26 ans et que tu viens de sortir de l'université,
sans nom connu ni compte en banque bien garni, tu as peu de crédibilité
aux yeux des financiers qui ne veulent prendre aucun risque",
renchérit Pierre-Luc Simard, qui déplore que les
finissants universitaires n'ont accès à aucun programme
pour les soutenir financièrement lors de l'élaboration
de modèles et de plans d'affaires, contrairement aux chômeurs
ou aux bénéficiaires d'aide sociale. En septembre
dernier, les deux diplômés ont donc recruté
un troisième larron, lui aussi originaire de Normandin,
Martin Villeneuve, diplômé des HEC, et se sont lancés
dans la recherche de financement.
Installé dans l'incubateur d'entreprises du Cégep
Lévis-Lauzon, le trio travaille désormais à
la croissance de deux entités distinctes: l'exploitation
agricole Nutrableu, qui sera située à Normandin,
et Novableu, qui se chargera du volet de développement
de nutraceutiques et d'aliments fonctionnels. Les associés
sont sur le point de conclure un accord financier d'un million
de dollars avec divers partenaires afin d'acquérir la
terre mais aussi plusieurs bâtiments dont une usine de
transformation et un laboratoire. Ils prévoient en effet
financer les recherches avec l'argent tiré de la vente
des bleuets, et convaincre ensuite les investisseurs de l'intérêt
de miser sur Novableu. De plus, les dirigeants de la bleuetière,
épaulés par Joseph Arul, professeur au Département
de sciences des aliments et de nutrition, vont mettre en place
une nouvelle approche de récolte et de conditionnement
pour limiter le dommage que subit le fruit. Grâce à
l'utilisation de nouvelles technologies, Nutrableu sera en mesure
d'améliorer la durée de vie et la qualité
des bleuets sauvages afin de répondre aux exigences de
plus en plus élevées des grossistes. Dans un second
temps, Novableu se lancera dans le développement de nouveaux
produits permettant d'accroître la valeur ajoutée
du bleuet et de moderniser une industrie encore limitée
à la première transformation.
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