
Toute une performance
Dans un fondu enchaîné à
la façon de Robert Lepage, les étudiants en arts
visuels ont véritablement crevé l'écran
Par Renée Larochelle
Connaissez-vous beaucoup de spectacles à Québec
qui bénéficient de la présence d'un des
hommes de théâtre les plus en demande à travers
le monde actuellement ? C'est pourtant ce qui est arrivé,
le 28 février, lors d'une surprenante performance présentée
par un groupe d'étudiants de l'École des arts visuels
inscrits à un atelier d'expérimentation théâtrale,
auquel Robert Lepage - en ville pour son Projet Andersen - a
discrètement assisté. Pour la petite histoire,
soulignons que le metteur en scène du spectacle et artiste
invité par l'École des arts visuels, Ludovic Fouquet,
s'intéresse énormément au travail de Lepage,
lui ayant même consacré sa thèse de doctorat.
"Je me souviendrai toujours du choc que j'ai ressenti en
voyant pour la première fois un spectacle de Robert Lepage,
raconte Ludovic Fouquet, qui a enseigné, entres autres,
le théâtre à l'Université d'Amiens,
en France. C'était Les Sept Branches de la rivière
Ota. J'avais été frappé par la simplicité
et l'épuration de la mise en scène. Avec quelques
objets, Lepage nous faisait découvrir un monde. Et quel
monde! Cela a orienté tout mon travail."
Présentée au Laboratoire des nouvelles technologies
de l'image, du son et de la scène (LANTISS) auquel est
d'ailleurs associé le groupe Ex Machina, la performance
qu'ont offerte 18 d'étudiants en arts visuels reflétait
bien ce souffle créateur qu'a insufflé Robert Lepage
au théâtre. Ombres et lumières crevant l'écran,
traversées furtives des apparences, miroirs révélateurs
de l'âme, identités qui se cherchent au cur d'un
monde où les images ne sont pas aussitôt créées
qu'elles se fondent en écho, dans le fracas d'un sens
qui échappe tout en étant parfaitement clair. Le
croirait-on? C'est à une véritable performance
à laquelle a assisté le public, les étudiants
enchaînant miraculeusement les scènes pour la première
fois, dans un ballet parfaitement réglé, à
travers la circulation dense des sons et la trace zébrée
des images vidéos.
Le chaînon manquant
Pour Mireille Brousseau, étudiante en troisième
année à l'École des arts visuels et qui
s'était inscrite à ce tout nouveau cours d'expérimentation
théâtrale portant sur la forme et sur l'image, l'expérience
a constitué une révélation. Tant et si bien
qu'elle a décidé de s'inscrire tout à la
maîtrise en arts visuels, elle qui prévoyait arrêter
ses études après le baccalauréat. "C'était
le chaînon qui manquait à ma formation, dit Mireille
Brousseau. Moi qui m'intéresse au corps et à l'empreinte,
j'ai été servie. Dès le départ, le
metteur en scène a accueilli nos propositions et nous
a aidés à en explorer les différentes facettes.
Le travail a été très physique, très
près du corps. Pour tout dire, je n'avais jamais vu des
étudiants arriver si enthousiastes à un cours!"
Responsable de la mise sur pied de ce cours d'expérimentation
théâtrale et directrice du baccalauréat en
arts plastiques à l'École des arts visuels, Nicole
Malenfant estime que ce projet s'inscrit en droite ligne dans
la volonté de l'Université de développer
des complémentarités, en l'occurrence, le théâtre
et les arts visuels. "L'Université a déjà
le LANTISS, un endroit privilégié pour faire progresser
les arts à Québec. Plusieurs jonctions entre différents
programmes sont possibles et nous aimerions bien y travailler."
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