Changement de régime à de Rochebelle La Chaire de recherche sur l'obésité aide une école secondaire à réformer ses habitudes alimentaires par Jean Hamann Depuis trois ans, Paul Boisvert, coordonnateur de la Chaire de recherche sur l'obésité, mène une croisade médiatique pour sensibiliser la population et les décideurs à l'épidémie d'obésité qui frappe les jeunes Québécois. L'an dernier, dans une entrevue qu'il accordait à Radio-Canada sur cette question, il écorchait au passage les écoles qui, comme l'école secondaire de Rochebelle à Québec, avaient signé des ententes d'exclusivité avec des fournisseurs de boissons gazeuses, en plus d'offrir des menus de piètre qualité à leur cafétéria. Quelques jours plus tard, lorsque le directeur de Rochebelle, Guy Dumais, lui a passé un coup de fil, non pas pour l'engueuler mais pour lui demander de l'aide afin de remettre son établissement sur le droit chemin alimentaire, Paul Boisvert n'a eu d'autre choix que d'accepter. "C'était une occasion à saisir pour montrer que nous ne sommes pas là uniquement pour critiquer, mais aussi pour aider lorsque c'est possible."
Cet appel a été l'élément déclencheur de ce qui pourrait peut-être annoncer le début d'un temps nouveau dans les cafétérias des écoles secondaires de la région. "La plate-forme d'intervention que nous élaborons à de Rochebelle pourra servir dans toutes les autres écoles qui veulent prendre un virage santé", estime Paul Boisvert. Un groupe d'intervention de la Chaire de recherche sur l'obésité et du Centre de recherche de l'hôpital Laval, formé de Paul Boisvert, Natalie Alméras, Hélène Venables et Marie-Ève Jalbert, a mis sur pied le "Comité Action Santé" de l'école de Rochebelle. En plus de ces spécialistes, on retrouve sur ce comité le directeur de l'école, le technicien en loisir, les responsables de la cafétéria (Montchâteau), l'infirmière ainsi que des représentants du comité étudiant, du conseil d'établissement et de la Commission scolaire. "Nous sommes maintenant une vingtaine de personnes autour de la table. Ça roule bien, tout le monde embarque et nous nous sentons appuyés", commente Paul Boisvert. Petit à petit Le comité a entrepris de changer progressivement l'environnement alimentaire des élèves. Les boissons gazeuses ne représentent maintenant que 12 % de tous les breuvages offerts dans les distributrices, les portions Jumbo ont été abolies, les croquettes de poulet sont cuites au four plutôt que frites dans l'huile, les gras trans sont éliminés, les chips qui ne sont pas cuites au four sont bannies de l'école, un bar à salade installé dans la cafétéria connaît un succès inespéré et, attention, les frites, qui étaient au menu quatre jours par semaine, ne le sont plus que deux jours. "Nous pensions qu'un jour aurait été suffisant, mais les représentants étudiants nous ont fait comprendre qu'il y aurait une émeute dans l'école si ça se produisait. On y va de façon progressive", admet Paul Boisvert.
L'entente entre de Rochebelle et Coke vient à échéance cet été et le comité la remet en question "parce qu'on aimerait offrir une gamme plus variée de boissons, d'eau et de jus dans les distributrices de l'école", confie Paul Boisvert. Mais, ce n'est pas tout de changer l'environnement alimentaire des élèves. Il faut aussi changer ce qu'ils perçoivent comme la norme si on veut changer leurs habitudes, poursuit-il.
C'est pourquoi le comité a aussi élaboré un programme d'information et de sensibilisation à la santé, comprenant notamment la production, par les élèves du profil international, d'affiches signalétiques décrivant la valeur nutritive des différents produits retrouvés dans les distributrices. À cela s'ajoutent la présentation de débats sur des thèmes touchant la santé, la diffusion de capsules santé dans le bulletin de l'école destiné aux parents et la tenue occasionnelle de déjeuners ou dîners santé, pendant lesquels l'habituel menu de la cafétéria est remplacé par des aliments sains. "Certains élèves ont été surpris d'avoir un panini jambon-fromage, un yogourt et de l'eau de source à la place d'un Coke et d'un hot-dog, mais en général, les réactions sont positives", commente Paul Boisvert. Environ 500 élèves ont pris part au repas santé du 4 février pendant lequel la joueuse de volleyball, Guylaine Dumont, qui a représenté le Canada aux Jeux olympiques d'Athènes, a pris la parole.
Le comité a entrepris la rédaction d'une politique portant sur la santé des jeunes. Cette politique, dont pourront s'inspirer les autres écoles, guidera désormais les choix de Rochebelle non seulement en ce qui a trait à l'alimentation mais aussi à la place réservée à l'activité physique. Curieux retour des choses, l'école qui était perçue comme le mauvais garnement du réseau, à la suite du contrat d'exclusivité qu'elle avait signé avec Coke, pourrait bientôt devenir, grâce à sa collaboration avec les experts de l'Université, un exemple à suivre en matière de bonne alimentation!
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