
À la scandinave
Des étudiants de foresterie ont
examiné le "modèle finlandais" sur le
terrain
par Yvon Larose
La Finlande, ce pays du nord-est de l'Europe surnommé
"le paradis des forestiers", fait face à des
problèmes de biodiversité. Une des raisons à
cela est qu'après un demi-siècle d'aménagement
intensif, le pourcentage de forêts naturellement diversifiées
représente aujourd'hui moins de quatre pour cent de l'ensemble
du territoire forestier. Une autre cause se trouve dans la nature
même des plantations d'arbres qui ont remplacé les
forêts naturelles. Ces plantations ont une structure simplifiée
et sont homogènes en termes d'essences. Quant à
la récolte hâtive des gros arbres, des arbres malades
et des arbres morts, elle nuit à la plupart des quelque
200 espèces animales menacées répertoriées
dans le pays. Ces animaux ont en effet besoin des chicots ou
des bois morts à un moment ou un autre de leur cycle de
vie.
Voilà quelques-uns des nombreux constats faits par un
groupe d'étudiantes et d'étudiants de l'Université
Laval et de l'Université du Québec à Montréal
lors d'un séjour de deux semaines en Finlande au mois
de mai 2004. Organisée par le Département des sciences
du bois et de la forêt de l'Université Laval, cette
mission d'étude de la forêt finlandaise était
placée sous la responsabilité du professeur Damase
Khasa. Le Fonds Jeunesse Québec et des partenaires privés
en ont assuré le financement. Le contingent de Laval comprenait
quinze étudiants de troisième ou de quatrième
année du baccalauréat en aménagement et
environnement forestiers. Les autres étaient des étudiants-chercheurs
ainsi qu'un étudiant inscrit au bac en génie du
bois.
"Depuis les années 1990, explique Damase Khasa, les
Finlandais essaient de faire marche arrière pour redonner
la richesse biologique à la forêt, notamment par
des travaux de restauration des tourbières, du reboisement
et la restauration des surfaces forestières dégradées.
Dans le même esprit, ils font aussi la gestion intégrée
et durable de la forêt dans son ensemble par le biais du
système finlandais de certification forestière,
qui est adapté aux conditions nationales, régionales
et locales des propriétaires de la forêt. En Finlande,
62 % du territoire forestier appartient à des propriétaires
privés."
Leaders sur la planète
Les Finlandais se sont imposés comme des chefs de
file mondiaux dans l'aménagement et l'exploitation de
la forêt par leurs machines forestières techniquement
très élaborées, leurs procédés
ou leurs produits. Le "modèle finlandais" consiste
en gros à couper les arbres en forêt naturelle puis
à aménager les lieux en plantations par l'ensemencement
du sol. En combinant cette approche au drainage des tourbières,
aux traitements sylvicoles et au contrôle des feux, les
forestiers finlandais ont obtenu une spectaculaire augmentation
de la productivité ligneuse. La foresterie finlandaise
se base sur des essences domestiques naturelles. Elle a pour
objectifs de garantir la production de bois de bonne qualité
tout en préservant la biodiversité des forêts
et leur multifonctionnalité. Elle garantit le droit de
"tout un chacun" par lequel toute personne peut pratiquer
ses activités en forêt à condition de respecter
la propriété privée et la nature. Bref,
la foresterie finlandaise est reconnue pour son caractère
durable car ses pratiques de gestion forestière tiennent
compte simultanément de considérations écologiques,
économiques et sociales.
Des représentants de l'Université d'Helsinki ont
encadré la mission québécoise. Les deux
groupes d'étudiants ont voyagé ensemble dans tout
le pays. Ils ont notamment visité des écoles forestières.
Sur le terrain, ils ont rencontré des intervenants forestiers
et des intervenants écologiques. Ils ont aussi visité
une forêt de recherche ainsi qu'une scierie moderne, celle
de la société UPM-Kymmene. "Les piles de bois
dans la cour à bois étaient des piles à
diamètres variables, en attente de coupe finale, en réponse
aux demandes des clients, indique l'étudiant François
Giguère, président de la mission en Finlande. En
comparaison, au Québec, cette cour à bois contiendrait
des arbres entiers, sans branches, classés par provenance
de la forêt où ils ont été coupés,
ou dans un tas pêle-mêle, en ligne continue, de dix
à douze mètres de hauteur, sur une distance de
100 à 200 mètres. Leur force, c'est l'approche-client.
En Amérique du Nord, c'est le volume."

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