![]() De l'église au muséeLe colloque sur le patrimoine religieux attire de nombreux fidèles Par Renée LarochelleIl n'y a pas seulement qu'à la veille de Noël que les gens se rendent à l'église. La preuve en est que durant les deux jours qu'a duré le colloque international sur le patrimoine religieux du Québec, les 12 et 13 novembre - le 14 étant consacré à la visite de sites religieux - l'église Saint-Dominique n'a pour ainsi dire pas désemplie, accueillant en son sein plus de 400 participants. Autre temps, autre moeurs : si la pratique religieuse ne cesse de piquer du nez, l'intérêt pour le patrimoine religieux est par contre bel et bien présent. Ayant pour thème "Le patrimoine religieux du Québec: de l'objet cultuel à l'objet culturel", cette rencontre était organisée en partenariat avec la Chaire de recherche du Canada en patrimoine ethnologique de l'Université Laval, le Musée des Ursulines de Québec, la Corporation du patrimoine et du tourisme religieux de Québec, le Centre interuniversitaire d'études sur les lettres, les arts et les traditions (CELAT) et la Société québécoise d'ethnologie. "Nos églises sont nos châteaux et à ce titre, il faut les préserver", estime ainsi Laurier Turgeon, professeur au Département d'histoire et l'un des responsables du colloque. Au Québec, le patrimoine religieux est très important. Les conférenciers qui sont venus débattre la question s'entendaient pour dire que le fait de transformer une église en musée ne constituaient pas un sacrilège mais bien une nécessité, en ces temps où les fabriques sont endettées et ne peuvent plus subvenir aux besoins des églises." Par exemple, à Montréal, la chapelle Notre-Dame de Bonsecours, qui recevait 200 visiteurs annuellement, en reçoit aujourd'hui 20 000 depuis qu'elle a été aménagée en musée. Pour les jeunes qui ne possèdent pas de culture religieuse, ou qui ignorent à peu près tout du catholicisme, l'église convertie en musée peut ainsi représenter un lieu d'apprentissage intéressant. Qu'en est-il de l'objet de culte qui prend le chemin du musée? Y-a-t-il là désacralisation du patrimoine? Pour Laurier Turgeon, le fait d'exposer un ostensoir qui a passé 50 ans dans une église ne lui enlève pas sa vocation. Et puis, rien n'empêche que l'objet ne reparte vers la sacristie un jour ou l'autre ou encore que le bâtiment religieux reprenne ses fonctions ecclésiastiques " L'un des conférenciers a parlé de l'abbaye de Sénanque, en France. Fondée en 1148, elle a été vendue des siècles plus tard à des industriels français qui y ont entreposé des pièces de musée égyptiennes. Dans les années 1980, les moines ont racheté le monastère qui a alors retrouvé sa vocation première. Comme on le voit, rien n'est jamais perdu." Tout n'est cependant pas rose dans le paysage religieux, bien des communautés religieuses - surtout féminines - étant réticentes à vendre des édifices et des biens parfois inestimables du point de vue patrimonial. Du côté des églises, les besoins commencent à être pressants, financièrement parlant. "Ces dernières années, seulement dans le diocèse de Sherbrooke, on a fermé 18 paroisses, explique Laurier Turgeon. Les banques savent que les fabriques sont à sec et ne vont pas prêter nécessairement l'argent pour convertir une église en musée, tout simplement parce qu'elles ne sont pas sûres du potentiel de reconversion en centre culturel ou en bibliothèque, par exemple."
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