
Les étudiants du cégep ont-ils encore
des parents?
Les points de vue du psychologue Richard Cloutier
et de l'humoriste Michel Barrette
par Renée Larochelle
Les étudiants du cégep ont-ils encore des parents?
C'est cette question pour le moins dérangeante qu'avait
choisi de débattre Richard Cloutier, professeur à
l'École de psychologie de l'Université Laval, à
l'invitation de l'Association des parents des étudiants
du Cégep de Sainte-Foy, le 2 octobre. Réponse du
conférencier: oui, les étudiants du cégep
ont toujours des parents, si "avoir des parents" signifie
qu'ils se sentent encouragés à poursuivre leurs
études, par leur mère, leur père, ou par
les deux. À cet égard, une recherche menée
auprès de 720 étudiants de ce collège montre
que 77 % ont cette impression sécurisante d'être
soutenus et appuyés dans leur cheminement scolaire. Toutefois,
être parent ne s'arrête pas là, a souligné
avec force Richard Cloutier, spécialiste du développement
socioaffectif chez l'enfant et l'adolescent.
"Être parent consiste à rester connecté
avec le jeune, tout en le laissant vivre. Et le carburant du
parent, c'est l'information, comme par exemple connaître
les personnes que fréquente son enfant, ses allées
et venues, ce qu'il vit au quotidien, en fin de compte."
Évidemment, l'affirmation parentale ne se construit pas
en un jour mais participe d'une culture familiale déjà
installée. En somme, estime Richard Cloutier, on ne peut
pas se mettre à jouer au gendarme avec son jeune du jour
au lendemain, si on a fait preuve de laisser-aller durant des
années.
Pour Richard Cloutier, un savant dosage de contrôle,
de sensibilité, d'ouverture et de compréhension
s'avère nécessaire pour une bonne communication
sans trop d'étincelles avec le jeune qui se prépare
à faire lentement le grand saut dans l'âge adulte,
du moins d'un point de vue légal. Car si 18 ans constitue
le chiffre symbolique de l'entrée dans la cour des grands,
il y a parfois loin de la théorie à la réalité.
"Les parents ont tendance à infantiliser leur ado
et à le considérer comme étant plus jeune
que son âge. De son côté, l'ado est porté
à hausser son âge, à se croire plus vieux.
Disons que l'âge véritable de l'enfant se situe
généralement entre les deux", précise
le psychologue. Pour réussir le pari de la communication
et ne pas perdre le fil, certaines conditions gagnantes figureront
au programme: le jeune doit se sentir compris, respecté
et percevoir l'interaction comme pertinente et "payante".
Collégien par procuration
Parlant de bons coups, l'Association des parents des étudiants
du Cégep Sainte-Foy n'avait pas raté le sien en
invitant, en première partie de cette rencontre, le populaire
humoriste Michel Barrette à venir parler de ses années
passées au cégep, lui qui a avoué n'y avoir
jamais mis les pieds. Après avoir été banni
de l'école secondaire à cause de son intérêt
trop marqué pour les activités parascolaires aux
dépens de ses études, Michel Barrette qui
se définit comme un "drop in out" - aura vécu
son cégep par procuration, comme il dit, à travers
ses enfants. "À l'école, ma motivation première
était d'être en représentation. Un jour,
le directeur de l'école m'a fait venir dans son bureau
et m'a lancé: ''Je ne sais pas ce que tu vas faire dans
la vie mais je ne suis pas inquiet pour toi''. Il ne croyait
pas si bien dire."
|