Combinaison explosiveLa génétique serait en cause dans le phénomène d'obésité induite par la prise de médicaments antipsychotiques Le gain de poids est un problème fréquent chez environ 30 % des personnes qui consomment des antipsychotiques pour traiter un problème de santé mentale. "Dans les cas extrêmes, un patient peut prendre jusqu'à 30 kilos en un mois", signale Yvon Chagnon, professeur à la Faculté de médecine et membre du Centre de recherche Université Laval-Robert Giffard. Cette réponse à la prise de médicaments pourrait bien avoir des assises génétiques, estiment le chercheur et ses collègues Chantal Mérette, Roch Bouchard, Claudia Émond, Marc-André Roy et Michel Maziade à la lumière de leurs plus récents travaux. Dans un article sous presse dans la revue Molecular Psychiatry, les chercheurs démontrent que les gens qui gagnent du poids après avoir pris des antipsychotiques partagent une séquence génétique similaire dans une région du chromosome 12. Les chercheurs ont établi ce lien en procédant au criblage génomique de 508 personnes, appartenant à 21 lignées familiales dans lesquelles des cas de schizophrénie et de maladie bipolaire avaient été rapportés. "Il ne s'agit pas d'une démonstration incontestable du lien génétique entre les antipsychotiques et la prise de poids, mais c'est cohérent avec cette hypothèse", fait valoir Yvon Chagnon. La région chromosomique identifiée par les chercheurs renferme le gène qui code pour un neuropeptide, le PMCH (pro melanin-concentrating hormone), signale le chercheur. Surtout connu pour son lien avec la pigmentation, ce gène est également associé au contrôle de l'appétit, au métabolisme énergétique et à l'anxiété/dépression chez les animaux de laboratoire. "Un gène peut interagir avec plusieurs autres gènes et ainsi avoir plusieurs fonctions, explique-t-il. C'est l'une des beautés qui nous a été révélée par le décodage du génome humain." Médecine personnalisée La prise de poids induite par la prise d'antipsychotiques a des multiples
effets pervers, signale Yvon Chagnon. Elle augmente les risques de maladies
cardiovasculaires et de diabète, perturbe le profil lipidique (bon
versus mauvais cholestérol) et constitue une entrave au bon suivi
du traitement. "Les patients, surtout les jeunes et les femmes, qui
constatent qu'ils prennent du poids à cause du traitement ont tendance
à cesser de prendre leurs médicaments", observe-t-il.
JEAN HAMANN |