Mutation démographique sur le campus
Près du tiers du personnel se renouvellera
dans les prochaines années
D'ici cinq ans, de 700 à 800 employés du secteur
administratif sur environ 2 000 devraient prendre leur retraite
de l'Université Laval. Un phénomène qui
touche aussi les professeurs dont 70 environ quittent leurs fonctions
chaque année. Comme bien des employeurs, l'Université
Laval - dont la moyenne d'âge des employés s'établit
à 49 ans - va se trouver bientôt confrontée
à une véritable révolution démographique.
Selon les prévisions, 25 % à 30 % du personnel
se renouvellera dans les prochaines années. Comment assurer
cette transition en douceur sans perdre l'expérience accumulée
par certains depuis plusieurs décennies? Voilà
la question sur laquelle planchent actuellement les gestionnaires
des ressources humaines.
Selon Claude Mailhot, directeur du Service des ressources humaines,
les prochains départs à la retraite ne devraient
pas se traduire par une réduction de personnel supérieure
à 5 %, car l'Université Laval s'oriente vers le
statu quo du nombre de ses employés. Après
avoir négocié des primes de séparation avec
les syndicats pour inciter les uns et les autres à quitter
plus jeunes leurs postes, l'organisation travaille plutôt
actuellement sur des primes de rétention. Cela permettrait
à des professionnels ou à des professeurs - qui
ont rarement accumulé 35 ans de cotisations à 55
ans puisque leur carrière démarre généralement
plus tard que le reste du personnel administratif - de différer
leur départ de quelques années. L'Université
entame donc actuellement des discussions avec les syndicats pour
modifier les conventions collectives en ce sens.
L'employeur se penche également sur les moyens à
déployer pour ne pas perdre l'expérience accumulée
par les uns et les autres en quelques décennies de travail.
«Les gens qui travaillent à la paye depuis trente
ans connaissent toutes les subtilités des déductions
à la source. Si un problème surgit avec la Régie
des rentes, par exemple, ce n'est pas indiqué dans un
livre, confie Claude Mailhot. Même chose avec la personne
chargée des relations avec les nouveaux arrivants qui
a des contacts privilégiés avec les consulats et
les ambassades.» L'Université souhaite donc que
les futurs retraités planifient leur départ plusieurs
mois à l'avance pour préparer leur succession.
Expérience en ligne
Les employés pourraient, par exemple, se faire interroger
sur les problèmes rencontrés dans leur travail
au cours des cinq dernières années. Le contenu
de ces entretiens constituerait ensuite une banque de données
classée par index, consultable par leurs successeurs.
Certains services expérimentent également le coaching,
où un futur retraité travaille quelques semaines
avec le nouvel employé pour mieux le former. Comme nombre
d'emplois ne s'apprennent pas sur les bancs d'école, l'Université
teste par ailleurs des modules d'apprentissage en ligne. Des
agents de gestion aux études reçoivent une formation
personnalisée sur leur ordinateur plutôt que de
suivre des conférences en classe. Si l'exercice s'avère
profitable, ce système pourrait être appliqué
ailleurs.
Le renouvellement massif de personnel a aussi des conséquences
sur la façon de gérer les employés. «Je
ne suis pas sûr que les gens plus jeunes qui se soucient
beaucoup d'une meilleure conciliation travail-famille accepteront
de travailler parfois la fin de semaine pour sortir la paye,
par exemple», indique le directeur du Service des ressources
humaines. Les gestionnaires devront donc suivre des formations
pour mieux s'adapter à la réalité des nouveaux
employés, peut-être davantage à la recherche
d'autorités morales que d'adeptes de la hiérarchie
pure et dure. Aux yeux de Claude Mailhot, l'Université
Laval doit également s'affirmer comme un employeur majeur
de la région de Québec, car souvent les diplômés
ne se doutent pas de la diversité de la palette de métiers
employés ici. «Les gens ignorent que nous employons
aussi bien des techniciens en optique photonique, des mécaniciens
d'ascenseur, que des psychologues, des ébénistes
ou des comptables», constate-t-il.
Depuis peu, l'Université organise donc des tournées
dans les cégeps ou les collèges privés pour
présenter ses besoins en personnel, car actuellement l'Université,
comme l'employeur, subit de plein fouet la concurrence du gouvernement
et des organismes parapublics de la région, eux aussi
en quête de nouveaux employés. Ce problème
de recrutement touche aussi certaines facultés ou départements
à la recherche de nouveaux professeurs, qu'il s'agisse
par exemple des sciences infirmières, de certains secteurs
des sciences de l'administration ou de pharmacie. «Dans
certains départements, nous accordons des congés
de perfectionnement pour permettre à un nouveau professeur
d'acquérir son doctorat, explique Claude Paradis, vice-recteur
adjoint aux ressources humaines. Parfois aussi, nous repérons
des étudiants particulièrement brillants pour les
inciter à poursuivre leur carrière à l'Université,
en leur accordant des bourses ou en leur promettant un poste.»
Les départements et les facultés passent parfois
des ententes avec les professeurs retraités leur fournissant
par exemple un bureau pour continuer une partie de leurs recherches
ou assurer l'encadrement des étudiants qui finissent leur
thèse. Une façon d'assurer la transition en douceur
avec les nouveaux professeurs.
PASCALE GUÉRICOLAS
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