
L'usine à rêves
Des étudiants de l'École d'architecture
ont planché sur un projet de recyclage et de réhabilitation
d'un bâtiment industriel à Lévis
Prendre une usine désaffectée au bord de l'Anse
Hadlow, à Lévis, à un jet de pierre du quai
Ultramar. Ouvrir le bâtiment et le faire parcourir par
des apprentis architectes, l'il bien ouvert. Leur demander d'imaginer
dans ce lieu industriel des ateliers et des salles d'exposition
où se côtoieraient des métiers d'art comme
la ferronnerie, la coutellerie, la fonderie. Le résultat
de cette recette hors de l'ordinaire? Une exposition des travaux
de 13 étudiants de deuxième année de l'École
d'architecture, qui se tient jusqu'au 19 mai dans l'entrée
de la Bibliothèque Pierre-Georges-Roy dans le Vieux-Lévis.
C'est en parcourant à vélo la piste cyclable qui
longe le fleuve que Louis Saint-Pierre, qui dirige l'atelier
de conception architecturale en recyclage et réhabilitation
de bâtiments, a eu le coup de foudre pour l'usine L'Hoir,
un bâtiment construit en 1939 par l'homme d'affaires belge
Georges-Armand L'Hoir afin d'y produire des seaux en aluminium,
ainsi que des casseroles et des cuves. Le professeur cherchait
justement un édifice qui permettrait à ses étudiants
d'imaginer de nouvelles fonctions dans un bâtiment existant.
Une réalité qui représente désormais
presque la moitié des contrats pour les architectes professionnels.
«L'usine présente des caractéristiques architecturales
intéressantes, explique Louis Saint-Pierre, comme ces
puits de lumière en dents-de-scie du genre de ceux que
l'on retrouve en Europe. De plus, sa situation face au fleuve
est magnifique.»
Les étudiants de deuxième année au baccalauréat
en architecture ont travaillé sur leur projet. Portées
par ce cadre hors du commun, plusieurs équipes ont donné
la vedette au panorama en installant un café ouvert sur
le large, en y plaçant un jardin intimiste de sculptures,
ou encore en faisant passer la piste cyclable à travers
le bâtiment afin qu'il s'intègre encore davantage
au paysage. Pour leur part, Cathy Gagné et Guillaume Morest
ont tenté dans leur projet de relier l'usine à
la maison voisine du poète Louis Fréchette. «Nous
avons prévu de construire une salle multifonctions fermée
dont un des murs servirait d'écran de projection à
ses poèmes, explique la jeune étudiante. On pourrait
aussi y rappeler l'histoire du lieu.»
Conscients de la richesse patrimoniale du bâtiment, les
étudiants en soulignent l'importance dans leurs créations.
«Nous avons imaginé une suite aux puits de lumière
qui se poursuivent à l'extérieur de l'édifice
principal, indiquent Johanie Boivin et Tina Lévesque Cahill.
Nous voulions aussi marquer l'évolution du site en installant
des murs-rideaux où la succession de panneaux pleins et
vides rappelle les carreaux cassés depuis l'abandon de
l'usine.» L'omniprésence de la lumière naturelle
dans le bâtiment les a également frappés.
Leurs ateliers d'artiste, installés le long des murs extérieurs,
bénéficient de l'éclairage maximum, ainsi
que plusieurs salles d'exposition. Reste à savoir ce qu'il
adviendra de tous les rêves nés autour de ce bâtiment
à l'abandon. Peut-être vont-ils inspirer le propriétaire
actuel qui projetait d'y construire des condos.
PASCALE GUÉRICOLAS
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