Un Big Brother bienveillant?
Les chercheurs du Laboratoire de vision et systèmes
numériques s'attaquent à la reconnaissance des
mouvements
Un système automatisé de surveillance par caméras
pourrait faciliter le maintien à domicile des personnes
autonomes qui souffrent de problèmes de mémoire
à court terme. En effet, grâce à ce système
développé au Laboratoire de vision et systèmes
numériques (LVSN), ces personnes pourraient être
averties par un signal sonore lorsqu'elles oublient un chaudron
sur le feu, une bouilloire branchée ou encore lorsqu'elles
négligent de refermer la porte de leur domicile derrière
elles.
De la science-fiction? Pas du tout, assure Denis Laurendeau,
directeur du LVSN et coordonnateur de MONNET (Monitoring of Extended
Premises: Tracking Pedestrians Using a Network of Loosely Coupled
Cameras), qui a brossé les grands traits de ce projet
dans le cadre d'une Grande conférence de la Faculté
des sciences et de génie, présentée le 7
avril.
Télé-réalité
Denis Laurendeau et ses collègues Robert Bergevin,
Alexandra Branzan-Albu, Patrick Hébert, Xavier Maldague,
Marc Parizeau et André Zaccarin, du Département
de génie électrique et de génie informatique,
ont obtenu 300 000$ pour réaliser la partie "reconnaissance
visuelle des mouvements" de ce projet. Pour livrer la marchandise,
les chercheurs vont installer huit caméras dans chacune
des cinq pièces d'un appartement expérimental qui
sera construit au Toronto Rehabilitation Institute. Ces 40 caméras,
reliées à autant d'ordinateurs s'échangeant
de l'information, serviront d'abord à calibrer les gestes
quotidiens de l'occupant et, par la suite, à le suivre
afin de comparer ses gestes et déplacements à son
répertoire de mouvements "normaux".
"Notre tâche consiste à décrire numériquement
les mouvements qu'une personne effectue normalement dans la vie
courante, explique Denis Laurendeau. Comme on s'intéresse
à des personnes âgées qui ont des problèmes
de mémoire à court terme ou d'ordonnancement d'activités
courantes - comme c'est le cas chez les personnes atteintes d'Alzheimer
-, on parle peut-être d'un répertoire d'une vingtaine
de gestes significatifs."
Le chercheur précise que le système sera programmé
de façon à avertir l'occupant lorsque quelque chose
d'anormal se produit. "Un message pourrait se faire entendre
pour lui signaler qu'il ne s'est pas occupé du chaudron
qu'il a mis au feu 20 minutes plus tôt", avance-t-il
en guise d'exemple. Le système pourrait aussi aviser automatiquement
un proche par téléphone si l'occupant faisait une
chute. L'équipe du LVSN travaille en étroite collaboration
avec le Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation
et intégration sociale de l'Université Laval pour
mener à bien ce projet.
L'après 11 septembre
La technologie développée dans le cadre de
MONNET pourrait trouver d'autres applications, notamment dans
le domaine de la surveillance des lieux publics comme les aéroports
et les gares. "Nous ne cherchons pas à comparer les
visages de terroristes connus aux images enregistrées
par les caméras, prévient le chercheur, mais plutôt
à identifier des changements chez un individu donné
qui peuvent être interprétés comme des comportements
suspects. Par exemple, on pourrait s'intéresser à
une personne qui a été vue sur une image de caméra
à 15 h avec un porte-documents et qui ne l'avait plus
deux minutes plus tard sur une autre image captée par
une deuxième caméra. Notre objectif est de parvenir
à faire ressortir ce type d'événements à
l'aide d'un système d'analyse numérique d'images."
La même technologie pourrait servir à la surveillance
en milieu urbain ou encore à la surveillance des garderies,
des cours d'école ou des résidences pour personnes
âgées, fait valoir Denis Laurendeau.
JEAN HAMANN
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