
L'intimité bafouée
Selon Josée Carbonneau, le vol s'apparente au viol
Il existe peu de recherches sur le phénomène du
vol et ses conséquences sur les personnes qui en sont
victimes. En effet, contrairement au viol, le terrain est encore
vierge en ce qui concerne ce crime. Le vol s'apparente toutefois
au viol, en ce sens que les victimes ont l'impression d'être
violées, "infectées", en somme, qu'il
y a eu intrusion dans leur intimité.
Ce sont toutes ces raisons qui ont incité Josée
Carbonneau à creuser le sujet, dans le cadre de sa maîtrise
en psychologie, recherche pour laquelle elle a remporté
un prix d'excellence de la Faculté des sciences sociales,
dans la catégorie du meilleur essai. "La plupart
des chercheurs s'entendent pour dire que les conséquences
psychologiques du vol chez les victimes ont plus d'importance
que les éventuelles lésions corporelles et les
pertes monétaires", souligne cette psychologue de
formation. "Quand un de nos proches est victime d'un cambriolage,
on est davantage porté à lui demander s'il est
assuré financièrement, alors que le plus important
serait de lui demander comment il va, compte tenu de l'événement
traumatique qu'il vient de subir."
Au secours!
En fait, la victime de vol passerait par trois étapes
distinctes. D'abord, "l'impact". Une personne qui se
fait arracher son sac à main dans la rue ou voler sa voiture
vit des sentiments de perte de contrôle, de peur, d'apathie
ou d'incrédulité, en plus de se sentir honteuse
ou coupable. À ces émotions se greffent parfois
des symptômes physiques ou somatiques comme des tremblements,
vomissements, nausées, vertiges, pleurs incontrôlables
et troubles de mémoire. Ensuite vient "le contrecoup",
stade au cours duquel la personne peut décider de déménager,
de prendre des mesures de protection, d'accroître sa consommation
de médicaments, de drogues, etc. Elle peut aussi devenir
plus méfiante envers les gens ou développer un
désir de vengeance envers son agresseur. S'installe enfin
"la réorganisation", qui se définit par
la recherche d'un nouvel équilibre.
Évidemment, les différents stades peuvent se chevaucher
et la personne peut opérer des glissements à tout
moment vers un stade antérieur, de constater la chercheure.
Si la plupart des gens finissent par intégrer cette expérience
à leur vie personnelle sans problème, certains
s'en sortent moins bien et vivent des symptômes de dépression.
Bref, un vol mal soigné peut dégénérer.
"Pour aider les victimes de vol, l'intervention de crise
pratiquée à court terme demeure la meilleure solution,
affirme Josée Carbonneau. Caractérisé par
une écoute active et empathique, ce soutien peut être
effectué par les policiers, les programmes d'assistance
aux victimes, les programmes d'aide aux employés et les
groupes de support et d'entraide. Une chose est certaine: la
victime ne doit jamais hésiter à demander de l'aide."
RENÉE LAROCHELLE
|