
Une tradition mélomane en Nouvelle-France?
Jean-Pierre Pinson et Conrad Laforte participent à
un ouvrage qui fera loi
Le moins qu'on puisse dire de la tradition musicale de nos ancêtres,
c'est qu'elle est plutôt méconnue. Surtout si l'on
s'intéresse à son versant classique, lequel fut
pourtant tout à fait vif dans la colonie française.
C'est ce que démontre hors de tout doute l'ouvrage La
vie musicale en Nouvelle-France, fruit d'une vingtaine d'années
de recherche au Canada, en France et aux Etats-Unis, et publié
chez Septentrion dans la collection "Cahiers des Amériques".
Deux musicologues ont dirigé cette vaste enquête
visant à mettre les connaissances à jour. Alors
que le professeur de l'Université Laval Jean-Pierre Pinson
détaille la pratique du chant religieux dans les paroisses,
les collèges et les séminaires d'autrefois, Élisabeth
Gallat-Morin (de l'Université de Montréal) répertorie
les orgues de Québec et de Montréal et ressuscite
la vie musicale telle que vécue dans la société
canadienne française des XVIIe et XVIIIe siècles.
À travers ces deux contextes, l'un sacré l'autre
profane, on observera avec intérêt l'évolution
du rôle et de la pratique du chant ainsi que de la musique.
Ces deux auteurs principaux bénéficient d'autre
part de collaborations très estimables. On retrouve là
Érich Schwandt, qui centre son regard sur les Ursulines
et l'Hôtel-Dieu, Paul-André Dubois (doctorant à
l'Université Laval) pour le chant des missionnaires chez
les Amérindiens, et enfin Conrad Laforte, ancien professeur
à l'Université Laval et réputé folkloriste,
à qui l'on doit l'inventaire et la typologie de la tradition
orale des chansons de canotiers.
Du contexte sacré qui prédomine jusqu'aux traditions
bourgeoise et ouvrière, cette somme permet de mieux situer
la tradition musicale dans sa filiation avec celle de la France,
avec des liens beaucoup plus étendus et raffinés
qu'on ne le croit généralement. Pour compléter
le monumental ouvrage, on y a joint un inventaire des archives,
des sources et des manuscrits qui en fait désormais une
solide référence.
THIERRY BISSONNETTE
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