Coup de pouce vert
Entrepreneuriat Laval a aidé deux spécialistes
de l'irrigation des sols à se lancer en affaires
Au fond, l'idée qui a donné naissance à
la firme Hortau vient d'une frustration. À la fin des
années 1990, Jocelyn Boudreau, étudiant à
la maîtrise en génie agroalimentaire, travaille
sur l'irrigation avec Jean Caron, professeur au Département
des sols, dans un laboratoire de recherche. Les deux hommes ne
parviennent pas à trouver des outils efficaces et faciles
d'utilisation pour mesurer correctement le taux d'humidité
du sol. Peu à peu, ils en viennent à développer
leur propre système, sans vraiment savoir si cette technologie
offre un réel potentiel commercial. Il s'agit d'une sonde
faite en partie d'une céramique poreuse, permettant de
constater rapidement si un terrain irrigué manque d'eau
ou non. À l'automne 2001, Jocelyn Boudreau cherche à
connaître la possible rentabilité du produit et
prend contact avec Entrepreneuriat Laval.
"Nous venions du milieu scientifique et n'avions donc aucune
connaissance du monde des affaires", reconnaît le
président directeur général d'Hortau. Au
début, les conseillers d'Entrepreneuriat Laval les aident
à structurer leur idée, en particulier pour définir
les marchés visés. Ensuite, ils les mettent en
contact avec des juristes et des comptables, mais aussi avec
d'autres entrepreneurs en démarrage. "Le partage
d'expériences avec des gens confrontés à
des difficultés semblables nous a beaucoup servi, raconte
Jocelyn Boudreau. Cela permet un certain support, mais aussi
de recevoir des conseils." C'est ainsi qu'à la suite
d'une discussion avec un entrepreneur vivant une situation analogue,
Jocelyn Boudreau et Jean Caron ont décidé de s'associer
financièrement à l'entreprise pouvant fabriquer
leur sonde plutôt que de la considérer comme un
sous-traitant. Une décision qui a permis à Hortau
d'économiser quelques années sur la recherche et
le développement car leur partenaire dispose d'une bonne
équipe de chercheurs.
Arroser à distance
Ensemble, les deux partenaires ont développé
une technologie permettant de relier la sonde à des valves
électriques afin de régler automatiquement l'arrosage.
Un logiciel pour le suivi et le contrôle en temps réel
de l'évolution de la tension du sol et de l'irrigation
a été également mis au point afin d'exercer
une surveillance à distance. Ces différents produits
offrent l'avantage de diminuer l'utilisation d'eau pour l'entretien
des végétaux bien sûr, mais contribuent aussi
à réduire les pertes de plantes cultivées
à grande échelle car elles reçoivent exactement
la quantité d'eau nécessaire à leur croissance.
Les coûts de main-d'uvre baissent par ailleurs puisque
plusieurs tâches sont automatisées.
Déjà, une chaîne de quincaillerie à
grande surface, présente aussi bien au Canada qu'aux États-Unis,
a acheté cette technologie, ainsi qu'un producteur de
tomates de serre qui souhaite qu'Hortau lui fournisse un produit
ressemblant à un thermomètre capable de mesurer
l'humidité du sol. Ces premières ventes rassurent
Jocelyn Boudreau. "J'avoue que j'ai trouvé très
difficile de vivre dans l'insécurité financière
lors du démarrage de l'entreprise, explique-t-il. Je
prenais des contrats à l'extérieur pour pouvoir
vivre, et il fallait en même temps travailler sur le plan
d'affaires et les demandes de financement."
Heureusement, les deux associés ont pu bénéficier
de l'aide d'un incubateur d'entreprises qui les a suivis pas
à pas, les premiers mois, pour mettre sur pied l'étude
de marché, le plan de marketing ou pour calculer leur
capacité de production. Cependant, pour partir véritablement
leur affaire, les deux associés n'ont pas eu le choix
d'investir personnellement 25 000 $, le Centre local d'emploi
et le ministère du Développement économique
et régional leur prêtant respectivement 30 000 $.
Les autres demandes de financement n'ont pas fonctionné
car les organismes prêteurs considéraient que les
dirigeants d'Hortau ne disposaient pas d'une technologie immédiatement
commercialisable. L'ajout de leur nouveau partenaire, une entreprise
spécialisée dans les logiciels, a changé
la donne puisqu'ils disposent désormais de plusieurs produits
prêts à vendre. Ainsi lancés, Jocelyn Boudreau
et Jean Caron rêvent désormais de développer
de nouveaux produits, toujours dans le domaine de l'irrigation.
Organisme reconnu dans le secteur du prédémarrage
et de la préincubation, Entrepreneuriat Laval a pour mission
de stimuler et d'accélérer l'émergence de
projets porteurs par le partenariat et le travail en réseau,
par le soutien à l'innovation et par le développement
d'entreprises, notamment et plus précisément dans
les secteurs de la nouvelle économie. Sa vision: devenir
l'acteur prioritaire en développement entrepreneurial
au sein de la communauté universitaire de l'Université
Laval, principalement auprès des étudiants. Entre
1993 et 2002, Entrepreneuriat Laval a contribué au démarrage
de 184 entreprises, dont 40 % sont issues du secteur de la nouvelle
économie. Ces entreprises ont généré
quelque 402 emplois, dont la majorité est occupée
par des finissants universitaires. Renseignements: www.fsa.ulaval.ca/EL
PASCALE GUÉRICOLAS
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