
Input-Output
Une quarantaine d'étudiants en architecture
créent un projet électrisant de complexe culturel
sur le campus
"J'ai vu avec surprise le soleil se lever dimanche matin;
j'avais complètement oublié que le monde existait.
Cela m'a pris du temps à revenir sur terre." Olivier
Boucher n'a pas eu besoin de prendre des substances psychotropes
pour planer hors du réel le 23 novembre dernier. En fait,
cet étudiant en première année à
l'École d'architecture participait, en compagnie d'une
quarantaine d'autres étudiants, à un concours d'idées
organisé par la direction de l'École durant la
fin de semaine. Cet exercice très intense, baptisé
"une charrette" dans le jargon du métier, avait
pour but de créer de façon fictive un complexe
culturel sur le campus de l'Université Laval. Deux architectes
de renom, Dan S. Hanganu et Marie-Chantal Croft encadraient l'activité,
accompagnés notamment de Denis Rochon, adjoint au vice-recteur
à l'administration et aux finances, d'Alain Bourque de
la Bibliothèque de l'Université Laval et de Claude
Dubé, doyen de la Faculté d'aménagement,
d'architecture et des arts visuels.
Pendant deux nuits et un jour, les dix équipes participantes
ont donc planché sans relâche pour produire une
esquisse du bâtiment, situé non loin de l'entrée
de l'Université sur le boulevard Laurier, pouvant répondre
à la commande émise par l'École d'architecture.
Il s'agissait de donner vie à l'idée d'un complexe
culturel intégrant la bibliothèque actuelle, la
bibliothèque municipale de l'arrondissement de Sainte-Foy
et différentes salles de conférence, un concept
dont la direction de l'Université Laval caresse la réalisation
depuis quelques années. Armés de leur imagination,
mais aussi de leur ordinateur et de monceaux de feuilles de papiers,
les étudiants disposaient de moins de 48 heures pour présenter
leur projet sous format "Powerpoint" au jury et à
l'ensemble des participants. À la clef, un prix de 1 500
$ pour les gagnants et d'autres prix pour les deux équipes
suivantes.
Campus cité ouverte
C'est finalement l'équipe d'Olivier Vallerand, d'Olivier
Jacques, d'Olivier Boucher et de Luc Bélanger qui a remporté
le gros lot avec le projet Input-Output. Sis au bord du boulevard
Laurier, en plein milieu de l'actuel boisé, leur bâtiment
se veut une porte publique sur le campus et un lien entre l'Université
et la ville, mais aussi entre l'Université et le monde.
Tournant le dos aux modèles anciens de bibliothèque-sanctuaire,
lieu de silence et d'austérité, les étudiants
ont imaginé un carrefour d'échanges où la
lumière entre à profusion, où chaque visiteur
laisse sa marque et entre en interaction avec les autres utilisateurs.
"Ce n'est pas un bâtiment, mais une ville, un réseau
offrant une grande liberté de circulation, précise
Luc Bélanger. On ne vient pas seulement brancher son ordinateur
ou chercher un livre, mais on en profite aussi pour assister
à une conférence, se réunir." Leur
ensemble architectural se présente comme un ensemble de
grandes barres de dimensions variables, abritant tant les collections
de la bibliothèque universitaire, que le centre muséographique
et la cinémathèque, ou des espaces de réunions.
Entre ces blocs, courent des passerelles ou des couloirs le long
desquels les utilisateurs se déplacent et se rencontrent,
ou encore s'installent pour lire à leur aise à
l'ombre des arbres poussant dans l'atrium central. "Nous
avons pensé installer un immense écran sur la façade
qui donne sur la ville, explique Olivier Vallerand, qui permettrait
à la fois de voir les gens à l'intérieur
du bâtiment, mais aussi de diffuser des scènes prises
à l'intérieur de l'Université."
Encore étonnée par l'intensité du travail
effectué durant l'exercice et du nombre d'idées
jaillissant à la minute, l'équipe gagnante avoue
avoir beaucoup apprécié l'expérience et
l'apport des architectes seniors qui les encadraient. "Au
début, nous avions envisagé plusieurs pistes sans
forcément savoir laquelle choisir, explique Olivier Jacques,
puis Dan Hanganu est arrivé et nous a mis sur la bonne
voie. En quelques minutes, il avait compris le concept des différentes
strates et de leur interpénétration." Même
si le projet des étudiants ne se réalisera sans
doute jamais, il va peut-être stimuler l'imagination de
la Commission d'aménagement qui réfléchit
actuellement au développement futur du campus de Sainte-Foy.
D'ailleurs, l'instance est présidée par nul autre
que le doyen de la Faculté.
PASCALE GUÉRICOLAS
|