Armes bactériologiques de bouche
Les dentistes québécois se protègent
relativement bien des risques d'infections mais les mesures de
protection des patients montrent quelques lacunes
Les dentistes ont une très bonne connaissance des risques
d'infections qui planent sur leur clinique, la plupart appliquent
des mesures adéquates pour contrôler la transmission
des microbes, mais il y a encore place pour l'amélioration.
Voilà, en bref, les conclusions d'une enquête menée
auprès de 500 dentistes québécois par Daniel
Grenier, Denis Mayrand et Julie Fortin, du Groupe de recherche
en écologie buccale (GREB).
Les résultats de l'enquête, la première du
genre au Québec, publiés dans le numéro
de septembre du Journal dentaire du Québec, montrent
que les dentistes se protègent relativement bien des risques
d'infections. Plus de 95 % des répondants ont reçu
le vaccin contre l'hépatite B et une forte proportion
porte toujours des gants (99 %), le masque (92 %) et des lunettes
protectrices (80 %). "Ce dernier point pourrait être
amélioré, signale toutefois Daniel Grenier. À
la Faculté de médecine dentaire, on enseigne aux
étudiants à toujours porter des lunettes lors des
traitements. On les oblige d'ailleurs à le faire."
Les mesures de protection des patients montrent par ailleurs
quelques lacunes. Ainsi, les répondants ont reconnu presque
unanimement que la désinfection des surfaces de l'unité
dentaire entre chaque patient était importante, mais 26
% des répondants négligent d'appliquer cette mesure.
Les chercheurs relèvent également le fait qu'un
dentiste sur quatre ne se lave pas les mains avec un savon bactériocide
entre chaque consultation. "Même si le dentiste porte
des gants, il doit se laver les mains pour prévenir les
risques d'infection advenant une coupure ou un bris des gants",
explique Daniel Grenier.
À peine 5 % des répondants demandent aux patients
de faire usage d'un rince-bouche antimicrobien avant le traitement.
"Pourtant, le recours au rince-bouche ou même le simple
brossage de dents réduirait énormément la
quantité de microorganismes pulvérisés dans
l'air du cabinet dentaire", commente le chercheur. La chose
est d'autant plus importante que moins de 23 % des cliniques
possèdent un système de purification de l'air.
Enfin, 35 % des dentistes ne procèdent pas à la
purge des canalisations de l'unité dentaire entre chaque
patient, "un geste simple qui exige à peine 30 secondes",
signale le professeur Grenier. Une étude antérieure
du GREB avait révélé que l'eau des unités
de soins dentaires contenait parfois des concentrations de bactéries
dépassant plus de 1 000 fois la norme pour l'eau potable.
"En bout de ligne, nos données indiquent que, même
si certaines de leurs pratiques doivent être corrigées,
les dentistes québécois font très bien au
chapitre des connaissances et des mesures relatives au contrôle
des infections, résume Daniel Grenier. Si on en juge par
les autres études du même genre réalisées
ailleurs, ils font aussi bien sinon mieux que les autres dentistes
dans ce domaine."
JEAN HAMANN
|