
Une poutine à l'huile d'olive?
La diète méditerranéenne pourrait
être importée sur les tables québécoises
et y produire ses prodigieux effets
Malgré les différences culturelles et culinaires
qui séparent le bassin de la Méditerranée
et le Québec, la diète méditerranéenne
pourrait trouver un terreau fertile dans les cuisines québécoises
et produire, ici, les mêmes bienfaits qu'en ses terres
d'origine. L'étudiante-chercheure Julie Goulet et la professeure
Simone Lemieux, du Département des sciences des aliments
et de nutrition, sont en voie d'en faire la démonstration
après avoir testé cette diète en situation
réelle auprès de ménages québécois.
Grâce à 73 participantes qui se sont prêtées
à une expérience de cuisine-réalité,
la diète méditerranéenne a subi le test
du quotidien québécois pendant près de six
mois. «Au départ, les participantes ont reçu
un cours sur les principes et les bienfaits de la diète
méditerranéenne, suivi d'un atelier de cuisine,
rappelle Julie Goulet. Puis, nous les avons laissé aller
dans un contexte de «vraie vie» afin d'évaluer
l'effet de cette diète sur leur santé, mais aussi
pour identifier les facteurs qui influencent l'adhésion
à ce type d'alimentation.»
Adieu McDo
La diète méditerranéenne repose sur
la consommation quotidienne de produits céréaliers
à grains entiers, de fruits, de légumes, de légumineuses,
de noix, de graines et de produits laitiers. Ajoutez à
cela, quelques fois par semaine, du poisson, de la volaille,
des oeufs, des sucreries et pourquoi pas un peu de vin rouge
si le coeur vous en dit. Pour compléter le tout, intégrez
un peu de viande rouge quelques fois par mois. Autre élément
important de cette diète, les gras - qui composent entre
25 et 35 % de l'apport calorique - proviennent essentiellement
de l'huile d'olive ou de l'huile de canola. Grâce à
ce régime, les Méditerranéens jouissent
d'un taux de mortalité par maladies cardiovasculaires
deux à trois fois plus bas qu'ailleurs en Europe ou aux
États-Unis.
Même si le but de l'intervention n'était pas la
perte du poids, les participantes ont perdu 0,4 kg et leur tour
de taille a diminué de 1,3 cm dans les trois premiers
mois de l'expérience. Beaucoup plus important, la diète
a apporté une amélioration significative au groupe
de participantes qui avaient le moins bon profil lipidique, rapporte
Julie Goulet dans l'article qu'elle signe avec Benoît Lamarche,
Geneviève Nadeau et Simone Lemieux, dans le dernier numéro
de la revue scientifique Atherosclerosis. "Le taux
de mauvais cholestérol a diminué de 8 % dans ce
groupe, souligne-t-elle. La marge pour l'amélioration
n'était pas très grande parce que, pour faire partie
de l'étude, les participantes devaient être en bonne
santé. Les écarts auraient sans doute été
plus prononcés si les sujets avaient eu un profil lipidique
plus détérioré au départ."
L'épreuve du temps
Seule ombre au tableau, les participantes, laissées
à elles-mêmes entre le troisième et le sixième
mois, ont abandonné quelque peu leurs bonnes habitudes
alimentaires pour retourner à une cuisine d'inspiration
nord-américaine. La raison? La cuisine méditerranéenne
trouve des détracteurs pas plus loin qu'autour de la table
à manger familiale. "Ce n'est pas facile de faire
manger du tofu et des légumineuses à des adolescents
pendant des mois, admet Julie Goulet. La diète fonctionne
dans la mesure où les gens ont du support pour maintenir
leurs bonnes habitudes."
L'étudiante-chercheure ne conclut pas à l'échec
de l'expérience pour autant. Après six mois, note-t-elle,
les participantes maintenaient un score de diète méditerranéenne
plus élevé qu'avant le début de l'intervention.
"C'est encourageant parce que chaque petite modification
qu'on intègre à notre alimentation quotidienne
produit, à long terme, des effets bénéfiques
durables pour la santé."
JEAN HAMANN
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