
Le commerce à la carte
Des chercheurs du CRAD sont les premiers à
modéliser les zones d'influence des centres d'achat de
la région de Québec
Une étude menée au Centre de recherche en aménagement
et développement (CRAD) lève le voile sur la concurrence
que se livrent les différents centres commerciaux de la
région de Québec, en apportant pour la première
fois des données tangibles sur leurs zones d'influence
respectives. Cette recherche de François Des Rosiers,
professeur de gestion urbaine et immobilière à
la Faculté des sciences de l'administration, de Marius
Thériault, professeur au Département d'aménagement
et directeur du CRAD, ainsi que de Laurent Ménétrier,
étudiant-stagiaire, leur a d'ailleurs valu des honneurs
au 19e congrès annuel de l'American Real Estate Society,
un des plus prestigieux congrès international en économie
urbaine et immobilière. Leur présentation, intitulée
Spatial Versus Non-Spatial Determinants Of Shopping Center
Rent: Modeling Location and Neighborhood-Related Factors
a remporté le prix de la meilleure communication dans
la catégorie "Retail Real Estate".
Le travail des chercheurs de Laval confirme la place prédominante
qu'occupent Place Laurier et les Galeries de la capitale dans
le paysage commercial de la région, en captant respectivement
22,5 % et 21,8 % des clients. Particularité intéressante
pour les propriétaires de ces centres commerciaux supra-régionaux,
la clientèle qui les fréquente a le gousset bien
garni, contrairement à celle qui visite régulièrement
Place Fleur de Lys, desservant essentiellement les quartiers
moins bien nantis de Limoilou et de Saint-Roch. Les cartes et
modèles produits dans le cadre de cette enquête
mettent en lumière le potentiel de vente des centres d'achat,
et non leurs ventes effectives, et ils illustrent la lutte entre
les centres commerciaux plus modestes, coincés dans leur
développement par la présence géographique
d'un concurrent. Bien utilisées, les données réunies
par les chercheurs devraient permettre aux dirigeants des centres
commerciaux de prendre des décisions éclairées
en matière de choix de produits à vendre, de présentation,
de publicité et d'aspect de leur ensemble de magasins.
Une chasse aux données
Il a d'ailleurs fallu un travail acharné de près
de deux ans et demi aux chercheurs de Laval pour réunir
l'ensemble des données, car les centres commerciaux répugnent
à divulguer des renseignements pouvant servir à
leurs concurrents. Finalement, une dizaine de centres commerciaux,
de diverses tailles, se sont pliés à l'exercice
en fournissant de nombreuses informations financières.
Pour produire l'étude sur les sphères d'influence,
l'équipe a essentiellement utilisé les données
provenant du recensement de Statistique Canada, ainsi que celles
fournies par le ministère du Transport et le Réseau
de transport de la capitale (RTC), qui interrogent régulièrement
les citoyens de la région sur leurs déplacements.
François Des Rosiers a d'ailleurs pu ajouter à
cette enquête des questions relatives aux habitudes de
magasinage.
Au volet de l'étude portant sur les zones d'influences
des magasins s'ajoute également une partie portant plus
spécifiquement sur les loyers payés par les locataires
de centres d'achat. Les chercheurs ont ainsi constaté
que les grands magasins de type Simon's ou Sears bénéficiaient
de conditions très avantageuses car ils jouent le rôle
d'aimant en drainant de nombreux clients vers le centre d'achat.
Par contre, le paiement au mètre carré pour les
petits locataires comme les kiosques où l'on trouve des
journaux, des chapeaux, de petits bijoux, s'avère beaucoup
plus élevé car leur situation centrale dans le
centre d'achat leur procure des revenus confortables. Tout comme
les bijouteries, qui constituent un excellent investissement
pour les propriétaires de centres commerciaux, ainsi que
les restaurants dans les centres "communautaires" de
type Plaza Lazal.
PASCALE GUÉRICOLAS
|