
Des mots sur leurs maux
Des patients fréquentant le Centre hospitalier
Robert-Giffard font de surprenantes incursions dans le domaine
de l'art et de l'écriture
Les artistes du programme Vincent et moi ont des idées
plein la tête, même si on les a souvent accusés
de perdre l'esprit. Ces créateurs fréquentent en
effet le Centre hospitalier Robert-Giffard ou un de ses satellites,
et s'adonnent à l'art par pure passion, comme n'importe
quel sculpteur, peintre, ou photographe. L'exposition "Mots
de tête et maux d'esprit", présentée
du 8 au 19 septembre, à la salle d'exposition du pavillon
Alphonse-Desjardins, se veut donc un clin d'oeil à tous
ceux qui ne voient la folie que comme un tourbillon de souffrances
et de douleurs.
"Il faut que les visiteurs se fassent leur propre idée
sur les oeuvres, explique François Bertrand, responsable
du programme Vincent et moi au Centre hospitalier Robert-Giffard.
Les artistes qui exposent éprouvent aussi du plaisir,
manient les mots d'esprit." La vingtaine d'oeuvres présentées,
toutes reliées au thème du visage ou de la tête,
permettent d'en apprendre davantage sur les intérêts
artistiques de peintres et de dessinateurs parfois autodidactes
ou au contraire dûment diplômés d'une école
d'art. Qu'elles grimacent, qu'elles rient, qu'elles rêvent,
ces figures constituent des sésames pour entrer dans les
univers de chacun, sans les préjugés reliés
habituellement à la maladie mentale.
Des textes, en lien ou non avec les uvres présentées,
accompagnent les tableaux et les dessins comme pour mettre des
mots sur les maux de leurs créateurs. "Certains artistes
utilisent l'écriture pour appuyer leur travail, indique
François Bertrand. Il arrive aussi que des écrivains
soient secoués par les images affichées au gré
des expositions et qu'ils réagissent en écrivant."
Un des buts poursuivis par Vincent et moi touche justement
à la rencontre entre des publics venus de différents
horizons en permettant notamment la diffusion des oeuvres en
dehors du milieu médical.
Ouvrir l'art
En place depuis deux ans au Centre hospitalier Robert-Giffard,
ce programme offre une collection de prêt d'oeuvres d'art
accessible non seulement au personnel hospitalier, mais également
à des institutions culturelles comme les musées
ou les théâtres. Sorties du cadre médical,
les oeuvres volent ainsi de leurs propres ailes sans que le spectateur
se préoccupe de l'évolution thérapeutique
de leurs concepteurs. Aux yeux de François Bertrand, Vincent
et moi constitue donc une véritable bouffée
d'air pur pour ceux qui se font régulièrement tancer,
juger et critiquer pour cause d'anormalité. Venez vous
faire votre propre idée en visitant l'exposition
PASCALE GUÉRICOLAS
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