L'étoile de David
Un athlète innu-montagnais s'impose en
demi-fond universitaire
"Ça va super bien." À quelques jours
du début d'une série de compétitions estivales,
David Gill, étudiant au baccalauréat en enseignement
de l'anglais langue seconde, affiche une belle assurance. Et
pour cause. L'athlète de 24 ans originaire de Mashteuiatsh,
une communauté innue-montagnaise située près
de Roberval au Lac-Saint-Jean, a été tenu à
l'écart de la compétition durant deux ans à
cause de blessures. Cette année, il a rebondi de manière
spectaculaire en remportant la médaille d'argent de l'épreuve
du 600 mètres en salle lors des Championnats universitaires
canadiens présentés à Windsor au mois de
février. Son temps de 1 minute 19 secondes et 25 centièmes
lui a permis de terminer l'épreuve à seulement
sept dixièmes de seconde du vainqueur. "J'ai eu de
très bons indicateurs de performance cette année,
dit-il, et j'ai pour objectif une performance maximale aux Championnats
canadiens séniors à Victoria en juillet, où
se fera la sélection des membres de l'équipe nationale
d'athlétisme."
Le mois dernier, David Gill est devenu l'un des très rares
athlètes amateurs universitaires au pays à recevoir
un appui financier de taille: 12 000 $ par an pour les trois
prochaines années, une gracieuseté d'un supermarché
de Roberval. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, l'athlète
de Mashteuiatsh dispose depuis le 21 mai d'un site Internet à
son nom (www.davidgill.ca). Dans la page d'accueil, il souligne
avec fierté ses origines. Il indique également
que l'entraînement intensif lui a permis de repousser ses
limites, en plus de lui montrer que tout est possible lorsqu'on
a un rêve et du cur au ventre. "Mon rêve est
celui du dépassement, explique-t-il, de devenir le meilleur
dans quelque chose. Et je ne vois pas le fait d'être autochtone
comme une limite, au contraire."
Un spécialiste du 800 mètres
David Gill s'entraîne sérieusement depuis 1997.
À 1,78 mètre et 71 kilos, il est taillé
sur mesure pour les courses de demi-fond. Il se spécialise
dans le 800 mètres, une épreuve difficile qui requiert
vitesse et endurance. David Gill est reconnu comme un athlète
doué, déterminé, mature et fort psychologiquement.
Sa préparation comprend un entraînement hebdomadaire
de 20 heures. Ses performances, il les doit également
à sa stabilité émotionnelle, à la
qualité de son sommeil et de son alimentation, et à
sa préparation psychologique. "En visualisation,
précise-t-il, j'essaie de développer une image
de moi en train de gagner, de tout réussir avec le sourire,
d'être confortable dans n'importe quelle situation de course."
Sur la piste, les choses sont cependant bien différentes.
Car le 800 mètres constitue, en ses mots, une "souffrance
pure". Courue à une vitesse presque maximale, cette
épreuve entraîne au niveau des jambes une fatigue
musculaire telle que les coureurs ont l'impression que leurs
jambes pèsent très lourd et qu'elles ne répondent
plus. "Il serait facile pour moi de descendre faire du 400
mètres, ou monter faire du 1 500 mètres, des souffrances
moindres d'après moi, indique-t-il. Mais je m'éloignerais
de ce pour quoi je suis fait. Le 800 mètres est la distance
dans laquelle je performe le mieux, où j'ai le plus de
chances de me rendre loin. Je dois donc aller au-delà
de la souffrance et l'accepter comme partie intégrante
de ce que j'aime."
Et l'avenir? David Gill se dit heureux au sein du Rouge et Or.
Il dit particulièrement apprécier le travail de
son entraîneur Fabien Basset et celui du physiothérapeute
d'athlètes de haut niveau Blaise Dubois. Il serait cependant
prêt à tous les sacrifices pour progresser. "Mon
entraîneur, dit-il, aimerait ça m'envoyer aux États-Unis
pour goûter au gros calibre de la NCAA (National Collegiate
Athletic Association). Les finales de ce circuit sont pratiquement
aussi fortes que celles des Jeux olympiques."
YVON LAROSE
|