Came et testostérone
Avec "Junk" d'André Morency, Les Treize proposent
une descente très physique dans le monde des petits malfrats
Âmes sensibles s'abstenir. Les démêlés
de Jack, le chauffeur de taxi, avec une bande de malfrats qui
veulent lui faire la peau n'ont rien d'une bluette sentimentale.
Junk, la pièce d'André Morency, plonge le
spectateur dans le monde interlope des petits voyous, insultes,
blagues grasses et répliques assassines comprises. Le
décor à l'aspect garage et bar louche, ainsi que
la mise en scène très physique de Marc Philippe
Parent, alourdissent encore un peu plus l'atmosphère.
L'action démarre alors que Jack vient de se séparer
de sa blonde et voit s'accumuler les dettes de drogue. Il accepte
d'accomplir une commission pour des connaissances afin de renflouer
ses finances.
Malheureusement, l'argent qu'on lui a remis disparaît,
et ses employeurs le menacent de mort s'il ne leur rend pas leur
dû. Jack n'a donc d'autre choix que de mener l'enquête
pour sauver sa peau. "C'est monté comme un scénario
de film avec un suspense, une intrigue, souligne le metteur en
scène. On cherche avec Jack ce qui s'est passé,
mais nous voulions éviter l'aspect grosse organisation
criminelle comme dans Hochelaga ou Omertà.
Junk se passe à un niveau au-dessous, dans le milieu
des petits caïds."
"C'est une pièce très "mâle",
renchérit Dominique Grenier, qui incarne une serveuse
au caractère bien trempé. Ce monde-là n'a
rien à voir avec l'ambiance dans laquelle nous vivons
tous les jours." Les acteurs ont d'ailleurs dû se
soumettre à un véritable entraînement physique
pour plonger dans un univers où les claques et les baffes
remplacent souvent la parole. Il leur a fallu chorégraphier
les combats pour éviter de se blesser en recevant un coup
de barre à clous, ou pour ne pas donner l'impression qu'ils
attendaient une baffe imminente.
Le quartier de l'enfance
Pour donner toute sa consistance à Jack, le héros
de la pièce, Éric Morasse a puisé dans ses
souvenirs d'enfance de petit gars du bas de la ville. "J'ai
un peu vécu la guerre des gangs dans Saint-Roch, explique-t-il.
Tu t'habitues à voir des gens se faire une ligne de coke
en écoutant une game de hockey, aux claques sur
la gueule, aux engueulades. Il faut que tu fasses ta place quand
tu viens de la basse-ville." Il remarque que dans la pièce,
comme souvent dans la vie, les personnages ont beaucoup de mal
à communiquer et semblent constamment sur la défensive.
La moindre erreur d'interprétation sur les propos de l'autre
tourne immédiatement à l'engueulade. "C'est
un monde qui survit plutôt que de vivre", précise
Dominique Grenier.
Le décor, imaginé par la scénographe Nathalie
Fortin, joue d'ailleurs beaucoup sur cette impression de violence
latente. Installé sur quatre niveaux différents,
il comprend un coin garage, un coin bar sur fond de métal,
d'échafaudage, de pièces de voitures. Un orchestre
présent sur scène du début à la fin
va d'ailleurs contribuer à alourdir le climat en interprétant
des transitions musicales dans le plus pur style rock-garage.
Bref, les spectateurs peuvent être assurés qu'ils
changent complètement d'univers en tentant avec Jack de
comprendre qui a subtilisé l'argent de la commission.
Junk, à partir de ce soir, 13 mars, jusqu'au 16 mars
à 20 h, à l'amphithéâtre Hydro-Québec
du pavillon Alphonse-Desjardin. Avec: Jean-Daniel Blouin, Amélie-Elsa
Ferland-Raymond, Annie Gignac, Simon Girard, Olivier Grégoire,
Dominique Grenier, Olivier Turcotte, Éric Morasse et Marc
Philippe Parent. Billets à 8 $ en prévente, et
10 $ à l'entrée.
PASCALE GUÉRICOLAS
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