De la condition humaine
Huit pièces de haut calibre figurent
au programme de la 54e saison des Treize
La troupe de théâtre Les Treize fait les choses
en grand pour sa 54e saison, présidée cette année
par Christian Michaud, un jeune comédien qui vient de
terminer le Conservatoire d'art dramatique de Québec après
trois ans consacrés à la troupe de l'Université
Laval. Pas moins de huit pièces prennent l'affiche jusqu'à
la mi-avril, s'ajoutant aux quatre pièces déjà
jouées cet automne, soit le double des productions produites
l'an dernier. En plus, la troupe lance un nouvel événement
cette année, le gala des trésors, présenté
le 17 avril. Lors de cette soirée-hommage, les créateurs,
les artisans et les comédiens impliqués dans la
saison 2002-2003 se partageront treize prix, exclusivement consacrés
au théâtre. Mais pour l'instant, le rideau se lève
sur les pièces à venir.
Les amateurs de drame humain auront de quoi pavoiser cette saison
car la plupart des pièces présentées relèvent
du registre dramatique. Qu'il s'agisse de drogue, de suicide
ou de lutte entre le bien et le mal, les étudiants des
Treize se posent de grandes questions essentielles sur la condition
humaine. Ainsi, Jocelyne Trudelle, trouvée morte
dans ses larmes, de Marie Laberge, qui prend l'affiche
du 20 au 22 février à l'Amphithéâtre
Hydro-Québec du pavillon Alphonse-Desjardins, met en scène
une jeune fille en quête d'absolu qui oscille entre la
vie et la mort. D'un côté ses parents, dont la mère
démunie face aux tourments intérieurs de sa fille,
et de l'autre, un violoncelliste à la musique obsédante.
Une semaine plus tôt, du 13 au 16 février au Théâtre
de poche du pavillon Maurice-Pollack, l'absurde tient le haut
du pavé avec la présentation de trois courtes pièces
de Fernando Arrabal. Qu'il s'agisse de Les Cucarachas de
Yale, de Bestialité érotique,
ou d'Une tortue nommée Dostoïevsky,
les couples sur scène s'échangent les répliques
les plus assassines, tout en donnant l'impression de manier le
compliment amoureux le plus doucereux au monde. Un peu plus tard,
Junk, d'André Morency, présenté
du 13 au 16 mars à l'Amphithéâtre Hydro-Québec,
constitue une plongée dans un autre univers dominé
par la violence. Dans cette intrigue policière sans policier
et à saveur hollywoodienne, de petits truands s'affrontent
dans un jeu très physique où les poings valsent
souvent plus vite que les mots. La pièce donne ainsi la
vedette à un chauffeur de taxi, issu du milieu de la drogue,
qui tente de démêler un imbroglio qui risque de
lui coûter la vie. Une production enlevée pour les
amateurs de sensations fortes.
Cet animal étrange, d'Anton Tchekov,
présenté au Théâtre de poche, transporte
le spectateur dans un milieu bien plus policé. Une jeune
ingénue, mariée à un riche vieillard, apprend
le jeu de la séduction auprès d'un soupirant rompu
à cet art. Très inspirée du théâtre
russe, qui rappelle sans cesse au public qu'il assiste à
une pièce de théâtre et non à une
véritable histoire, la production emboîte les tableaux
les uns dans les autres comme dans un jeu de poupées gigognes,
où qui croyait séduire est séduit. Chaque
année, Les Treize donnent aussi la chance à un
travail de création de prendre la scène. Il s'agit
pour cette saison de Monologue avec le diable,
écrit par Stéphane et Henri Lamontagne, où
un riche retraité vit les affres d'un combat intérieur
entre les forces du bien et celles du mal. Rendez-vous du 27
au 30 mars au Théâtre de poche, pour savoir qui
l'emportera.
La résistible ascension d'Arturo Ui, de
Bertolt Brecht nage également dans les eaux troubles,
celles du milieu interlope de Chicago où la terreur, le
mensonge, l'hypocrisie et le chantage règnent en maître.
Cette pièce, que l'on pourra voir du 3 au 6 avril à
l'Amphithéâtre Hydro-Québec, constitue en
fait une véritable métaphore de la montée
au pouvoir d'Adolf Hitler, qui profite de la peur ou de la lâcheté
des uns et des autres pour se tailler un empire. La semaine suivante,
du 10 au 14 avril au Théâtre de poche, le spectateur
poursuit son exploration des turpitudes de l'âme humaine
à travers le drame passionnel d'Élisabeth dans
Kamouraska. Adapté par Claude Jutras,
le chef d'oeuvre d'Anne Hébert donne la parole à
une panoplie de personnages qui cherchent à comprendre
si oui ou non l'épouse du seigneur de Kamouraska a commis
l'irréparable avec son amant, le docteur Nelson.
Pour finir la saison en beauté, en se déridant,
un groupe de passionnés monte une comédie musicale
où le chant et la danse constituent la vedette. Dans My
Fair Lady, de Georges Bernard Shaw, présenté
les 12 et 13 avril au Théâtre de la Cité
universitaire, une petite vendeuse de violette se transforme
en grande dame à l'anglais impeccable, grâce aux
bons soins d'un linguiste en quête de pari. Bien évidemment,
l'histoire maître-élève ne s'arrête
pas là.
En souhaitant bonne chance à tous les artisans de cette
saison d'hiver qui s'amorce, le comédien Christian Michaud
leur a souhaité beaucoup de bafouillages, de sueurs froides,
de rires et, surtout, une énorme dose de plaisir. Il sait
de quoi il parle, puisque son expérience au Treize l'a
conduit à pratiquer le métier qui le passionne
aujourd'hui, comme Josée Deschênes, Raymond Bouchard
ou Jean-Nicolas Verreault avant lui.
Le Bureau des activités socioculturelles (local 2344,
pavillon Alphonse-Desjardins) vend les billets avant le spectacle
au coût de 8 $, le coût étant de 10 $ à
l'entrée. Une exception pour My Fair Lady:10 $
en prévente et 12 $ à la porte du spectacle. Les
représentations débutent à 20 h.
PASCALE GUÉRICOLAS
|