Vers une agriculture verte?
Un accès conditionnel à l'aide gouvernementale
pourrait amener les agriculteurs québécois à
prendre le virage environnemental
"L'écoconditionnalité est un des moyens
pour prendre le virage nécessaire en matière d'agro-environnement,
affirme l'agronome Isabelle Breune, chargée de projet
à l'Union québécoise pour la conservation
de la nature (UQCN). Cette approche consiste à lier le
soutien financier versé aux entreprises agricoles à
la poursuite d'objectifs de protection de l'environnement, à
l'adoption de pratiques agricoles reconnues sur le plan environnemental
et au respect des lois et règlements environnementaux
en vigueur. Mais il reste beaucoup à faire pour que les
programmes de soutien adoptent ces pratiques et respectent ces
lois et règlements."
Isabelle Breune prononcait une conférence, le lundi 20
janvier au pavillon Paul-Comtois, sur le thème "L'écoconditionnalité
dans l'agriculture du Québec". Cette présentation
donnait le coup d'envoi des activités du mois de l'agriculture
et de l'alimentation, dans le cadre des Grandes Fêtes de
l'Université. Selon la conférencière, il
serait possible de mettre en place d'ici cinq ans une partie
des propositions qu'elle a formulées au nom de l'UQCN,
entre autres, celle qui concerne la suspension des paiements
à l'entreprise agricole en cas de non-respect de la réglementation
environnementale en vigueur.
Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation du Québec gère différents
programmes d'aide à l'entreprise agricole, notamment celui
consacré au remboursement des taxes foncières.
Ce programme dispose, pour l'année en cours, d'un crédit
de 78 millions de dollars. "Les entreprises qui mettent
en place des mécanismes de protection de zones sensibles
(boisés, zones humides, bandes riveraines élargies,
etc.) pourraient bénéficier de conditions maximales
de remboursement, avance Isabelle Breune. En ce qui concerne
le financement par l'État de nouveaux projets comme l'agrandissement
de l'entreprise agricole, on pourrait en limiter le financement
parce que la mise en opération présenterait à
court ou à moyen terme des difficultés environnementales."
Des problèmes d'érosion et de contamination
L'agriculture, au Québec, ce sont quelque 30 000 fermes
et environ deux millions d'hectares de terre en culture. Le principal
problème en ce qui a trait à la qualité
des sols est l'érosion hydrique, qui conduit à
des pertes de sédiments dans les cours d'eau. Ces cours
d'eau reçoivent également des éléments
fertilisants comme le phosphore ou l'azote. On constate aussi
des problèmes de contamination de puits de surface et
de puits artésiens par des nitrates ou des bactéries.
Différentes pratiques agricoles satisfont aux principes
de base de l'écoconditionnalité. Il y a notamment
la rotation des cultures, la préservation des zones tampons
et des lieux de biodiversité, ainsi que la limitation
de l'apport d'intrants. Selon Isabelle Breune, la rotation des
cultures est la mesure principale et prioritaire à favoriser
dans une conception de développement durable. "L'instauration
d'un tel système, dit-elle, a des impacts sur tous les
autres aspects de la gestion agroenvironnementale: conservation
des sols, lutte intégrée des ennemis des cultures,
recyclage des fertilisants, etc." En ce qui concerne la
limitation de l'apport d'intrants, l'approche d'écoconditionnalité
recommande notamment le recyclage à l'interne de la totalité
des fumiers et des lisiers produits, ainsi que la réduction
de l'emploi des pesticides.
YVON LAROSE
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