![]() |
5 décembre 2002 ![]() |
Le déclin démographique des régions n'a laissé
indifférent aucun des participants au dernier débat
de la Chaire publique de l'AÉLIÉS qui avait lieu
le 27 novembre au pavillon Alphonse-Desjardins. Tous ont souligné
l'urgence d'agir alors que certaines régions comme la Gaspésie
et les Iles-de-la-Madeleine se dépeuplent constamment depuis
plus de quarante ans. Par contre, leurs avis diffèrent
dès qu'il s'agit d'avancer des solutions pour contrer ce
phénomène qui semble jusqu'à présent
inéluctable.
Selon Laval Doucet, un professeur retraité de l'École
de service social qui travaille actuellement à la mise
en place, à l'Université Laval, d'une chaire multifacultaire
d'étude et d'intervention sur la Gaspésie et les
Iles-de-la Madeleine, l'avenir des régions passe, à
long terme, par l'invasion pacifique des réfugiés
venus du monde entier, en quête d'une terre hospitalière.
Plus près de nous, ce professeur qui a longtemps enseigné
l'organisation communautaire mise sur un nécessaire équilibre
entre l'État, le marché libre et les communautés
locales pour développer efficacement une région.
Mais il insiste pour dire que l'essor d'un coin de pays comme
la Gaspésie ne repose pas seulement sur ses citoyens. Les
habitants de grandes villes peuvent inverser le flux traditionnel,
et aller, par exemple, étudier en régions.
Gino Reeves, directeur de Place aux jeunes, croit que bien des
diplômés qui se trouvent dans les centres urbains
rêvent de retourner dans leur coin de pays. La nomination
en janvier prochain d'agents de migration dans chacune des régions
du Québec devrait permettre à ces expatriés
d'en apprendre davantage sur l'état actuel de leur région,
de découvrir notamment des opportunités d'emplois,
et finalement de revenir chez eux. Tous ces arguments laissent
de glace Roméo Bouchard, le président de l'Union
paysanne: "Je travaille au développement régional
depuis 1962 mais il faut bien se rendre compte que nous avons
perdu notre temps car les régions continuent à décliner.
C'est une maladie mal diagnostiquée car elle continue à
progresser."
Occuper le territoire
Le bouillant activiste cite ainsi quelques unes des causes
traditionnellement avancées pour expliquer l'exode des
régions, qu'il s'agisse de la dénatalité,
du manque d'initiatives locales, de la mondialisation. Selon lui,
le modèle économique des pôles de croissance
a montré qu'il ne fonctionnait pas car les villes continuent
de se développer aux dépens des régions périphériques.
Pour lui, la cause est entendue: la désertification constante
des campagnes s'explique en grande partie par le manque de volonté
politique du gouvernement. "Chaque ministère devrait
avoir comme objectif l'occupation du territoire, qu'il s'agisse
de celui du transport, de la santé ou de l'agriculture",
martèle-t-il.
Roméo Bouchard soutient que l'État devrait intervenir
davantage pour favoriser les économies régionales,
en poussant par exemple les organismes de financement agricole
à mieux soutenir les petits producteurs installés
en régions. Et de citer les systèmes de compensation
norvégiens où les agriculteurs touchent le même
revenu, quelle que soit leur situation géographique. Ce
type de discours n'émeut pas plus que de raison le député
de Lac Saint-Jean du Parti Québécois, Stéphan
Tremblay, qui prône plutôt l'éveil des jeunes
à l'entrepreneurship. Marqués par l'industrie de
l'aluminium, qui a dominé pendant tant d'années
l'économie de sa circonscription, les jeunes de ce coin
de pays manqueraient, selon lui, de modèles de bâtisseurs
d'entreprise. Comme pour l'appuyer, un étudiant en génie
des matériaux a d'ailleurs pris la parole pour présenter
son projet d'ouvrir bientôt une usine de fabrication de
pales pour éoliennes dans sa région natale, la Gaspésie.
Cette région comptera donc un exilé de moins prochainement.
![]() |