31 octobre 2002 |
L'histoire de l'éducation des filles demeure souvent
absente dans les volumes d'histoire et ce domaine de recherche
vit, aujourd'hui, le même traitement que l'histoire des
femmes dans le passé. C'est le constat lancé par
Nadia Fahmy-Eid, historienne à l'Université du Québec
à Montréal, lors de la 12e conférence biennale
de l'Association canadienne d'histoire de l'éducation (ACHE),
qui se tenait au Manoir Victoria, du 24 au 27 octobre.
La démarche de la conférencière a consisté
à consulter les volumes de synthèse d'histoire de
l'éducation, et aussi ceux d'histoire générale,
et à évaluer ensuite, en nombre de pages, l'espace
réservé à l'éducation en général,
puis à celle des filles. "Les résultats sont
désolants, signale Nadia Fahmy-Eid. L'apport est bien modeste.
Dans le livre d'histoire générale qui lui donne
le plus de place, seulement 25 pages sur 660 sont réservées
à l'éducation, et le thème de l'éducation
des filles ne dépasse pas une page et demie. On ne peut
pas dire que les auteurs ont fait des excès!"
Selon cette historienne, qui est une pionnière dans ce
domaine spécialisé et qui a d'ailleurs contribué
à la formation de plusieurs chercheurs au cours des 20
dernières années, les synthèses d'histoire
générale ne donnent que quelques bribes d'informations,
glissées ici et là, sur l'éducation des filles.
"Pourtant, ces synthèses sont considérées
comme complètes, comme des success stories!",
lance-t-elle, en rappelant que les auteurs des uvres plus récentes
n'ont pas d'excuse.
Nadia Fahmy-Eid constate que, dans les livres traitant exclusivement
d'histoire de l'éducation, une place plus grande est réservée
à celle des filles et que ces documents traitent de problématiques
essentielles qui devraient normalement se trouver dans les volumes
d'histoire générale: "On aurait dû traiter
des façons d'intégrer les écoles pour les
filles, des coûts engendrés par les études,
de l'accessibilité différente aux garçons.
Les ouvrages ne parlent pas de cette discrimination structurelle
que vivaient les filles, incluant le faible nombre d'institutions
et le problème d'accessibilité de celles-ci au marché
du travail." Ce qui fait dire à Nadia Fahmy-Eid que
l'histoire de l'éducation des filles vit maintenant le
même problème que celle des femmes auparavant.
La conférencière souligne que la structure universitaire,
départementale ou facultaire, est peut-être liée
au problème: "L'histoire de l'éducation est
à cheval entre deux mondes, celui de l'histoire et celui
de l'éducation. Pour les individus, c'est plus facile de
rejoindre les deux, mais pas pour les départements."
La présidente de l'ACHE, Thérèse Hamel, professeure
à la Faculté des sciences de l'éducation,
a conclu la conférence en rappelant l'appel de Nadia Fahmy-Eid:
"Les frontières invisibles entre les départements
existent et il faudra les briser. Et il faudra le faire à
l'intérieur de nos institutions". Un appel qui semble
se généraliser à toute l'étude de
l'histoire de l'éducation, sujet principal de cette conférence
biennale qui coïncidait avec les Grandes Fêtes de l'Université
Laval.
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