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23 mai 2002 ![]() |
"Une jaune le matin, deux rouges avant chaque repas et
une bleu foncé le soir avant d'aller dormir." Les
trucs que les personnes âgées utilisent pour se souvenir
des médicaments qu'elles doivent prendre ont de quoi effrayer,
tout comme leur relative insouciance face aux effets que peut
produire un non-respect de la prescription. On pourrait croire
que l'incapacité de lire ou de comprendre les indications
inscrites sur l'étiquette des bouteilles peut expliquer
une bonne partie du problème, mais une étude du
Groupe de recherche en épidémiologie, qui vient
de paraître dans la revue scientifique Gerontology,
montre que tel n'est pas le cas!
Lors de tests menés auprès de 325 personnes âgées
de la région de Québec, Jocelyne Moisan, Michel
Gaudet, Jean-Pierre Grégoire et Réjanne Bouchard,
de la Faculté de pharmacie, ont découvert que près
de 40 % des répondants ne parvenaient pas à lire
correctement trois étiquettes placées dans des bouteilles
standards de médicaments. De plus, 70 % ne comprenaient
pas parfaitement les indications présentées sur
ces étiquettes.
Presque la moitié des répondants estimaient ne pas
respecter la prescription de leurs propres médicaments.
Étonnamment, leur capacité à lire et à
comprendre l'information présentée sur les étiquettes
lors des tests n'avait pas d'impact sur l'observance de leur traitement!
"De deux choses l'une, analyse Jocelyne Moisan. Soit une
bonne partie de ces personnes croient respecter la prescription,
mais dans les faits elles ne le font pas, soit elles adoptent
des mécanismes (trucs de mémoire, pilulier) pour
compenser leurs incapacités." Les chercheurs ont découvert
que la non-observance du traitement dépendait davantage
de facteurs comme les moyens financiers pour se procurer des médicaments,
la perception de non-efficacité de certains traitements
et l'insatisfaction face aux informations dispensées par
leur pharmacien.
Simplifier et informer
L'insoutenable légèreté de l'être
âgé face aux médicaments porte à conséquence:
guérison retardée, aggravation de l'état
de santé et risque accru d'hospitalisation. "Les coûts
directs et indirects du non-respect des prescriptions sont difficiles
à mesurer, mais certaines études avancent des chiffres
de l'ordre de 7 à 9 milliards de dollars au Canada seulement",
constate Jocelyne Moisan.
La non-observance des prescriptions n'est pas unique à
la région de Québec, signale la chercheure. D'autres
études, conduites ailleurs au pays, sont arrivées
à des chiffres du même ordre. "Si on veut aider
les personnes âgées à bien prendre leurs médicaments,
il faut simplifier les régimes thérapeutiques en
éliminant les médicaments qui ne sont pas nécessaires
et en réduisant la fréquence de prise de médicaments,
lorsque c'est possible, propose Jocelyne Moisan. Par la suite,
le recours à un pilulier peut être utile. Les pharmaciens
doivent également prendre conscience que la qualité
de l'information qu'ils dispensent est très importante
pour les personnes âgées. C'est avec leur pharmacien
qu'elles ont les contacts les plus réguliers pour tout
ce qui touche leurs médicaments."
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