21 mars 2002 |
"L'autre monde rural." C'est sur ce thème
plutôt évocateur qu'avait lieu, le 12 mars dernier,
une conférence de Roméo Bouchard, président
de l'Union paysanne. Invité par le Département de
sociologie dans le cadre d'un sur les mouvements sociaux, Roméo
Bouchard a exposé pendant une heure et demie sa vision
de l'agriculture et de l'alimentation, telles qu'elles devraient
être aujourd'hui.
Le combat mené par l'Union paysanne préconise en
effet une agriculture axée d'une part sur l'autosuffisance
alimentaire, afin de procurer aux populations une nourriture saine
et diversifiée, et ce, dans le respect de la nature, des
sols et des animaux, et d'autre part, sur une occupation du territoire
qui permettrait d'assurer le maintien de campagnes vivantes et
la prospérité de nombreux agriculteurs.
Roméo Bouchard impute le dépeuplement des campagnes
québécoises à l'industrie agroalimentaire.
Selon lui, les grosses firmes ont éliminé peu à
peu les fermes familiales, en plus de polluer l'environnement.
En guise de statistiques, le conférencier note qu'il ne
reste plus au Québec que 30 000 agriculteurs, sur les 140
000 qu'ils étaient en 1950. Il précise cependant
qu'il n'est pas question pour l'Union paysanne d'interdire l'agriculture
industrielle, mais plutôt de chercher à ce que celle-ci
cohabite avec l'agriculture dite "sociale". Le tout,
c'est de réinventer l'agriculture afin d'assurer la sécurité
alimentaire aux consommateurs. À ce propos, le président
de l'Union paysanne signale d'ailleurs que les contribuables financent,
par leurs impôts, en moyenne 50 % du revenu des agriculteurs
et qu'ils ont donc leur mot à dire sur la manière
dont ils voudraient que les aliments, les sols, les eaux, les
animaux et l'environnement soient traités.
Souveraineté alimentaire
En d'autres mots, les consommateurs devraient exiger la "souveraineté
alimentaire" et ne pas faire main basse sur les OGM, les
produits de synthèse, les aliments irradiés etc.
Roméo Bouchard pense en effet que la nature première
de l'agriculture n'est pas de faire du business mais plutôt
de nourrir une population et d'entretenir un territoire et que
les échanges internationaux de produits agricoles ne devraient
pas déstructurer ce principe.
L'Union paysanne revendique elle-même le statut de "syndicat
citoyen" et non de syndicat corporatif, car elle ne regroupe
pas que des producteurs agricoles mais aussi tous ceux qui se
veulent soucieux de l'alimentation et de la survie de la campagne.
Selon Roméo Bouchard, il y a un paysan caché à
l'intérieur de chaque Québécois, ainsi qu'un
lien fort à la terre et à la nature. C'est en vertu
de ce rapport fondamental que tous devraient exiger la sécurité
alimentaire.
Le syndicat citoyen songe également à fonder une
confédération paysanne, à l'image de celle
qui existe en France et dont le très controversé
président, José Bové, constitue une figure
de proue dans la lutte contre la "malbouffe". Le syndicat
projette également la création d'un journal et d'un
centre de formation.
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