14 mars 2002 |
ÉTHIQUE DE LA RECHERCHE: L'ÉLOGE DE LA TRANSPARENCE
En réponse aux lettres de M. François Demers
et de Mme Lilie Desjardins, publiées dans ces pages ces
dernières semaines, il apparaît opportun de faire
mieux connaître le Cadre général d'application
de l'énoncé de politique des trois conseils fédéraux
à l'Université Laval.
Depuis quelques années, les normes et l'encadrement entourant
la participation de sujets humains aux projets de recherche ont
fait l'objet d'un regard plus attentif et donné lieu, au
Canada, entre autres, à la publication par les trois conseils
subventionnaires fédéraux (le Conseil de recherche
médicales du Canada devenu les Instituts de recherche
en santé du Canada, le Conseil de recherches en sciences
naturelles et en génie du Canada et le Conseil de recherches
en sciences humaines du Canada) d'un Énoncé de politique
Éthique de la recherche avec des êtres humains
(EPTC - Août 1998).
Ce document indique que "Désireux de promouvoir une
éthique irréprochable en matière de recherche
avec des sujets humains et constatant l'évolution des besoins
du milieu de la recherche, les Conseils se sont efforcés
de définir une conduite commune balisant ce type de recherche",
et que "Cette politique étudie les devoirs interdépendants
partagés par les chercheurs, par les établissements
et les commanditaires de recherche ainsi que par les comités
d'éthique de la recherche (CÉR) à l'égard
des sujets de recherche." (réf : EPTC Buts et
raison d'être de cette politique - http://www.nserc.ca/programs/ethics/francais/policy.htm).
Le but étant de proposer et d'inspirer des interventions
réfléchies, fondées sur des principes éthiques:
le respect de la dignité humaine; le respect du consentement
libre et éclairé; le respect des personnes vulnérables;
le respect de la vie privée et des renseignements personnels;
le respect de la justice et de l'intégration; l'équilibre
des avantages et des inconvénients; la réduction
des inconvénients; l'optimalisation des avantages.
Les chercheurs jouissent de libertés et de privilèges
importants. Toutefois, les chercheurs et les établissements
reconnaissent que ces libertés s'accompagnent de responsabilités,
dont celle de s'assurer que la recherche avec des sujets humains
obéit à des normes scientifiques et éthiques
rigoureuses.
En conformité avec l'EPTC, le conseil d'administration
de l'Université Laval a abrogé l'ancien Comité
de déontologie de la recherche et constitué le Comité
d'éthique de la recherche (CÉRUL). L'Université
a donc rendu obligatoire l'évaluation de tout projet de
recherche impliquant des sujets humains, tel que défini
à la règle 1.1 de l'EPTC, réalisé
sur le campus ou ailleurs, tant par les chercheurs que par leurs
étudiants inscrits à la Faculté des études
supérieures de l'Université Laval, ou faisant appel
à des sujets recrutés parmi les membres de l'Université
Laval.
Bien que l'on puisse comprendre les inquiétudes ou appréhensions
de ceux qui suspectent le Comité d'éthique de la
recherche de devoir appliquer sans discernement une norme rigide
à l'ensemble des projets, même à risque minimal,
traitant de la même façon les entrevues avec des
adultes éclairés que les recherches sur des questions
délicates avec des sujets mineurs et des protocoles pour
lesquels des risques sérieux sont envisagés, l'expérience
démontre que la réalité est toute autre.
D'une part, déjà nombreux sont les témoignages
transmis au CÉRUL de la part de chercheurs qui ont apprécié
la qualité du support et des commentaires reçus,
mais également le souci du comité de comprendre
les particularités de certains projets et de proposer de
manière constructive des façons de faire acceptables
et respectueuses des sujets. D'autre part, l'EPTC prévoit
déjà que certains types de recherches ne devraient
pas être évaluées par un CÉR. C'est
le cas par exemple de la recherche appliquée à des
politiques publiques, à l'histoire moderne ou à
la critique littéraire et artistique. Il en va de même
pour les études directement reliées à l'évaluation
du rendement d'un organisme, de ses employés ou de ses
étudiants, et menées conformément au mandat
de l'organisme ou à des conditions d'emploi ou de formation.
On ne peut nier que l'exigence de soumettre les projets de recherche
impliquant des sujets humains à l'approbation d'un comité
comporte certains inconvénients, et il importe de les atténuer,
ce à quoi nous travaillons avec la Faculté des études
supérieures et avec les étudiants eux-mêmes.
Les avantages sont cependant considérables. Au nombre de
ceux-ci, l'aspect formateur de cette démarche réalisée
par l'étudiant ou l'étudiante, qui doit présenter
son projet de mémoire ou de thèse en faisant ressortir
les éléments qui doivent être analysés
sous l'angle du respect et de la protection des sujets, est primordial
dans le cadre d'une formation universitaire. Enfin, l'évaluation
systématique des projets par un comité permet d'assurer
une plus grande transparence non seulement vis-à-vis de
l'institution, mais envers toute la société.
Loin d'être un pâle substitut au nécessaire
encadrement du projet par le directeur de recherche, le regard
d'un tiers avisé, tel que le Comité d'éthique
de la recherche, vient enrichir le processus pour le bénéfice
des sujets. Cette démarche vise de plus à préserver
la précieuse confiance du public envers la recherche et
le développement des connaissances, essence même
de l'institution universitaire. Est-ce vraiment là une
pente malsaine?
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