7 mars 2002 |
Cinq femmes et leur ventre, dans une clinique de maternité.
Cinq femmes, que les hasards de la vie réunissent pour
vivre ensemble les derniers mois de leur grossesse. Elles pourraient
parler linge de bébé, s'émouvoir sans arrière-pensée
de la fabuleuse aventure que constitue le développement
de leur bébé. Sauf qu'il y a un os, un os d'ordre
monétaire: l'enfant auquel chacune d'elle s'apprête
à donner naissance sera vendu dès sa mise au monde
à un couple qui l'attend déjà dans une autre
clinique. Voilà résumée en quelques lignes
l'intrigue de Légères en août, présenté
par Les Treize au Théâtre de Poche.
D'emblée, les six comédiennes, qui prêtent
leur voix et leur corps à ces mères en devenir et
à la directrice de la clinique, ont été séduites
par les mots de l'auteure française de la pièce,
Denise Bonal. "C'est un texte sensible, plein de poésie",
remarque Amélie-Maude Boucher, étudiante en littératures,
qui a elle-même proposé de monter cette pièce
qu'elle avait déjà jouée à l'Université
de Moncton en 1995. "L'aspect humain de la pièce m'a
chavirée", s'exclame pour sa part Marie-France Fournier.
"Le texte, très bien écrit, apporte autant
de moments de réflexion que d'émotions", renchérit
Isabelle Bouffard.
Juger ou faire ce qu'on peut?
Les questions éthiques soulevées par la pièce
ont passionné les membres de la troupe, qui ont passé
des heures autour de la table de travail à discuter des
motivations profondes de leurs personnages, pour pouvoir les aborder
avec sincérité. En s'appuyant sur les situations
comiques de la vie quotidienne imaginées par l'auteure
et sur les instants de tendresse qui se créent entre ces
femmes en attente de leur accouchement, les interprètes
ont voulu dévoiler l'humanité profonde qui caractérise
chacun des personnages. Même cette Ginette, que l'on pourrait
facilement qualifier de "machine à bébés",
ou l'esthéticienne, sur le point de réaliser son
rêve d'institut avec l'argent qu'elle percevra pour l'enfant,
ou encore cette Portugaise, assujettie aux décisions prises
par son amoureux, paraissent finalement moins immorales que le
spectateur pourrait le penser au départ.
"En jouant la pièce, j'ai compris qu'il était
très facile de juger les gens, mais que dans la vie, on
fait surtout ce qu'on peut" indique Isabelle Bouffard, tandis
que Marie-France Bernier avoue: "Je m'étais toujours
dit que si je tombais enceinte brusquement, je me ferais avorter.
Finalement, j'ai vu que ce n'était pas aussi simple."
Écrite en 1974, alors que l'avortement devenait légal
en France, la pièce redevient d'actualité, à
l'heure des implantations d'embryons dans les utérus de
mères porteuses. Montée dans un souci d'intimité,
Légères en août veut susciter
une réflexion chez les spectateurs, sans pour autant les
assommer avec des jugements idéologiques. La pièce
devrait d'ailleurs connaître une seconde vie cet été,
alors que la troupe Les Treize sera reçue par L'abri-bus,
un groupe de comédiens amateurs de Grenoble en France,
tandis que ces derniers présenteront leur propre production
en juillet à Québec. Légères en
août, est présenté du 13 au 17 mars à
20 h, au Théâtre de Poche du pavillon Maurice-Pollack.
Les billets sont disponibles au Service des activités socioculturelles
ou à la porte, le soir du spectacle.
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