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17 janvier 2002 ![]() |
L'if du Canada est une véritable poule aux oeufs d'or
pour la compagnie Bioxel Pharma. Cet humble arbuste de sous-bois
produit des taxanes, une famille de molécules très
précieuses, utilisées en chimiothérapie.
Un kilo de taxanes vaut présentement jusqu'à 500
000 $. La jeune compagnie pharmaceutique de Québec souhaite
intensifier sa récolte d'if sans pour autant nuire à
la conservation de cet arbuste sur lequel repose son avenir. Voilà
pourquoi elle a confié à une équipe de recherche
du Centre de recherche en biologie forestière, dirigée
par Alison Munson, de la Faculté de foresterie et de géomatique,
le soin de déterminer quelle technique de récolte
lui permettrait d'utiliser au mieux cette ressource sans la mettre
en péril.
En conférence de presse le 10 janvier, le président
de Bioxel Pharma, Pierre Lacroix, a annoncé que sa compagnie
investissait 150 000 $ dans cette recherche de cinq ans qui vise
l'utilisation durable de l'if. "À nos débuts
en 1996, rappelle l'homme d'affaires, nous utilisions deux tonnes
métriques d'if par année. En 2001, ce chiffre est
passé à 125 tonnes. Nous prévoyons avoir
besoin de plus de 2 000 tonnes par année lorsque nous aurons
atteint notre vitesse de croisière." Il faut savoir
que les taxanes se retrouvent en très faibles concentrations
dans la plante. Ainsi, pour obtenir un kilo de paclitaxel, le
produit vedette de Bioxel, il faut environ 30 tonnes métriques
de biomasse verte.
Question de taille
L'if du Canada pourrait servir d'emblème à tous
ceux qui défendent les principes de l'utilisation polyvalente
des forêts et du maintien de la biodiversité en milieu
forestier. Arbuste sans intérêt pour les compagnies
forestières, il est peu apprécié des acériculteurs
qui tentent tant bien que mal de l'éliminer de leurs érablières,
signale Alison Munson. "L'if est très résistant,
ce qui est à l'avantage de Bioxel Pharma. Cependant, nous
savons encore très peu de choses de la biologie de cet
arbuste et de ses réactions à la taille."
Alison Munson, sa collègue Line Lapointe, du Département
de biologie, et l'étudiant-chercheur Richard Daigle procèdent
depuis l'été dernier à des tests sur un site
expérimental de la station forestière de Duchesnay.
L'objectif est d'étudier comment l'if réagit à
quatre intensités de tailles, allant de légère
à totale, pratiquées à divers moments de
l'année. Les chercheurs évalueront comment ces tailles
affectent la repousse de la plante et la concentration de taxanes
dans les aiguilles et les tigelles de l'if. "Le Québec
constitue le principal réservoir naturel de taxanes au
monde et nous voulons améliorer nos méthodes de
cueillette et de traitement de cette plante", fait valoir
Pierre Lacroix.
La Fondation québécoise de la faune a profité
de la conférence de presse pour annoncer qu'elle créait
le Fonds Bioxel Pharma, consacré à la recherche
sur les relations entre l'if et la faune qui y est associée.
Ce fonds dispose d'une somme de 75 000 $. La Fondation invite
les chercheurs à lui soumettre une intention de projet
d'ici le 31 janvier.
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