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Existe-t-il des plantes capables de résister longtemps
aux sels de déglaçage, aux huiles à moteur,
à l'essence et aux autres polluants émis par les
automobiles? Jacques-André Rioux s'est engagé à
trouver une réponse à cette question d'ici peu.
En effet, ce professeur du Département de phytologie agit
comme botaniste-expert auprès de la Ville de Québec
pour le projet-pilote de "stationnement vert" qui sera
mis en chantier le printemps prochain.
Ce laboratoire sans mur servira à évaluer l'efficacité
de bandes de végétation - nommées poétiquement
"jardin de pluie" par les responsables du projet - pour
capter, retenir et filtrer les eaux de ruissellement d'un stationnement.
Présentement, après une pluie abondante, l'eau collectée
par les égouts excède la capacité de traitement
des usines d'épuration, de sorte que les surplus se retrouvent
dans les rivières et le fleuve, sans traitement préalable.
Cette masse d'eau polluée contribue à l'érosion,
aux inondations et à la contamination du milieu aquatique,
souligne Jacques Grantham du Service de l'environnement de la
Ville de Québec. "En milieu urbain densément
occupé, il est pratiquement impossible d'utiliser de grandes
surfaces à des fins d'aménagement de bassins de
rétention des eaux de ruissellement", poursuit-il.
Le projet de "jardin de pluie", doté d'un budget
de 200 000 $ provenant à parts égales du gouvernement
fédéral et de la Ville de Québec, permettra
le réaménagement d'un stationnement dont la pente
dirigera les eaux de ruissellement non pas vers l'égout
pluvial, mais vers des parcelles densément peuplées
de végétaux. "Les eaux ainsi captées
seront partiellement retenues par la masse de terre végétale,
explique Jacques Grantham. Par la suite, elles seront filtrées
et utilisées par les plantes. Les surplus d'eau seront
retournés au réseau pluvial par l'intermédiaire
d'un système de drainage, en tenant compte des risques
d'inondations locales."
Les plantes choisies pour aller au front devront donc être
très tolérantes aux sels, aux polluants et aux inondations
périodiques, signale Jacques-André Rioux. "Nous
n'avons pas encore déterminé quelles plantes seront
mises à l'essai, mais il pourrait s'agir d'herbacées,
d'arbustes ou même d'arbres. Je ne crois pas qu'il y aura
une espèce-miracle qui pourra faire tout le travail. Il
est plus probable que nous faisions appel à une communauté
de plantes." Il se peut également que des bactéries
capables de biodégrader les hydrocarbures soient intégrées
au jardin de pluie, ce qui augmenterait les chances de survie
des plantes. "En plus, l'aménagement ne doit pas nuire
aux opérations de déneigement, ajoute le chercheur.
Il y a donc beaucoup d'éléments à prendre
en considération."
Jacques-André Rioux se montre tout de même confiant
de trouver le bon assemblage d'espèces pour ce jardin de
pluie et d'en démontrer l'efficacité d'ici deux
ou trois ans. Au-delà des considérations écologiques,
le chercheur estime aussi que la dimension esthétique du
projet n'échappera pas au citadin moyen. En effet, la présence
de quelques oasis de verdure dans des déserts de bitume
ne diminuera certes pas la qualité de l'environnement en
milieu urbain.
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