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Phénomène psychique propre au sommeil, le rêve est une activité automatique inconsciente qui toujours prend la forme d'une représentation dramatique intérieure. L'action de celle-ci, à la fois irrationnelle, involontaire et incompréhensible, se déroule comme un film dans notre esprit. Parce qu'il porte sur la conflictualité, c'est-à-dire sur quelque chose d'essentiellement humain, le rêve n'est pas sans rappeler le genre tragique au théâtre. Telles sont quelques-unes des conclusions de la thèse de doctorat en philosophie qu'a déposée dernièrement François Sirois, psychiatre à l'Hôpital Laval. "Dans L'Orestie d'Eschyle, dans le mythe d'Oedipe ou, plus près de nous, dans Hamlet de Shakespeare, des membres d'une même famille s'entredéchirent, explique-t-il. Il semble paradoxal que ce qui est très humain semble le moins humain. Dans le rêve, c'est un peu la même chose."
Objet psychologique ou de science expérimentale?
Depuis quelques années, la psychanalyse se retrouve
dans le collimateur de la science expérimentale. Méthode
de psychologie clinique, fondée par Sigmund Freud au tournant
du 20e siècle, la psychanalyse étudie en particulier
les manifestations psychiques inconscientes, dont le rêve.
Comme le souligne François Sirois, le rêve n'est
pourtant pas ce qu'on pourrait appeler un objet de science expérimentale
puisqu'il est impossible à observer et impossible à
reproduire. Il s'agit d'un produit de l'imagination qui est passé,
sans étendue et essentiellement construit par une représentation.
"Il y a aujourd'hui une tendance à aborder la psychanalyse
avec les critères de la science expérimentale ou,
si l'on veut, avec les yeux de la logique, indique-t-il. Cette
controverse, qui se polarise sur la lecture des écrits
de Freud, laisse échapper la nature de l'objet propre de
la psychanalyse - l'inconscient - en considérant le rêve
comme un objet extérieur. Or, Freud montre, en s'appuyant
méthodologiquement sur les écrits d'Aristote, que
l'on peut aborder cet objet par la pensée, parce qu'il
s'agit d'un objet de pensée, un objet mental qui ne peut
être examiné autrement qu'en étant raconté."
Pour le philosophe grec Aristote, le rêve n'a aucune finalité
et n'est ni objet de hasard, ni objet de superstition, ni objet
de message divin. "Toute sa vie, Freud s'est réclamé
de cette définition du rêve qui en fait un objet
psychologique, précise le psychiatre. Du point de vue d'Aristote,
le rêve offre certaines ressemblances avec l'action humaine."
Il ajoute que, même si le désir, élément
central de la pensée freudienne, n'est pas lié au
rêve chez Aristote, il n'en est pas moins compatible avec
la pensée de ce dernier.
Un déchet de l'activité psychique
Freud a vécu à une époque où l'on
percevait le rêve comme une forme inférieure de pensée,
une sorte de déchet de l'activité psychique. "Son
mérite, soutient François Sirois, est d'avoir étudié
le rêve dans sa nature propre, et non en le comparant à
un modèle de pensée dans la vie éveillée.
Sa méthode interprétative des rêves est pertinente
à l'objet onirique."
Dans sa pratique professionnelle, ce dernier aborde chaque cas
par le point de vue subjectif de la représentation. "Mon
approche, dit-il, consiste toujours à dégager cet
aspect. Donc ce n'est pas tellement l'analyse du rêve comme
telle que j'explore, que l'analyse des représentations
qu'ont les personnes par rapport à leur expérience
spécifique. Deux personnes, à la suite d'une chirurgie
ou d'une maladie, peuvent avoir une réaction extérieure
identique. Mais intérieurement, leur expérience
de la situation peut être différente."
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