|
Au Québec, 63 % des petits systèmes municipaux
de distribution d'eau ont connu au moins un épisode de
contamination aux coliformes chaque année entre 1997 et
1999. C'est ce que démontre une étude qu'une équipe
multidisciplinaire du Centre de recherche en aménagement
et développement (CRAD) a présentée le 9
novembre, sur le campus, à l'occasion du 17e Symposium
de l'Est du Canada sur la recherche portant sur la pollution de
l'eau.
Housseini Coulibaly, Manuel Rodriguez (Aménagement), Mélanie
Verreault (Biochimie et microbiologie) et Jean Sérodes
(Génie civil) ont analysé les données sur
la qualité de l'eau que 247 municipalités de 200
à 10 000 habitants ont fournies au ministère de
l'Environnement du Québec entre 1997 et 1999. Ils ont ainsi
découvert que près de 5 % de tous les échantillons
prélevés dépassent la norme touchant la concentration
de coliformes. Dans les municipalités de 200 à 1
000 personnes, près de 13 % des échantillons prélevés
pendant l'été excèdent cette norme.
Malgré tout, l'eau des petites municipalités est
de relativement bonne qualité, soutient Housseini Coulibaly.
"Certains tests positifs de coliformes constituent des cas
isolés. Dans l'ensemble, nous estimons que 30 % des petits
réseaux municipaux sont problématiques (un ou plusieurs
épisodes de coliformes pendant deux des trois années
étudiées). Ces réseaux desservent environ
15 % de la population québécoise."
Des chercheurs du CRAD proposent une stratégie qui assurerait une eau de bonne qualité dans les petites municipalités
Stratégie intégrée
Afin d'identifier la cause des problèmes qui surviennent
dans ces réseaux, les chercheurs ont comparé plus
à fond cinq systèmes problématiques et cinq
systèmes conformes aux normes. Les caractéristiques
des deux types de réseaux choisis étaient en tous
points conformes, notamment au chapitre du traitement qui consistait
en une chloration simple de l'eau.
"Les caractéristiques de l'eau brute sont très
semblables dans les deux catégories de systèmes,
affirme Housseini Coulibaly. Les problèmes relèvent
donc de la façon dont le réseau est géré."
Dans la plupart des cas, explique-t-il, la présence des
coliformes tient au fait que les gestionnaires n'ajoutent pas
suffisamment de chlore dans l'eau. "Une fraction des microorganismes
survivent à la chloration et comme il n'y a pas suffisamment
de chlore résiduel dans l'eau, il y a recroissance bactérienne
plus loin dans le réseau."
La solution ne réside pas dans l'ajout massif de chlore,
prévient le chercheur, puisque les sous-produits de la
désinfection au chlore sont soupçonnés de
causer des cancers. D'ailleurs, les nouvelles normes en matière
de qualité de l'eau au Québec placent les petites
municipalités devant un dilemme: si elles ajoutent suffisamment
de chlore pour respecter les normes microbiologiques, elles risquent
d'enfreindre celle des sous-produits de désinfection. "Il
faut trouver un juste équilibre et certains petits systèmes
y parviennent, même en n'effectuant qu'une simple chloration",
souligne Housseini Coulibaly.
La solution réside dans une stratégie de gestion
intégrée du système, poursuit-il. En plus
de la chloration de l'eau, la stratégie doit viser à
éviter la prolifération des bactéries après
le traitement. Il faut notamment reconfigurer les sections du
réseau où l'eau demeure stagnante, remplacer les
anciens tuyaux de fonte sur lesquels s'accrochent les bactéries
et effectuer chaque année deux rinçages du réseau.
"Ces mesures exigent des investissements, mais même
les petites municipalités ont les moyens de les mettre
en pratique, estime le chercheur. Chose certaine, elles évitent
les coûts très élevés reliés
à l'acquisition d'un système complet de traitement
de l'eau tout en assurant une eau de bonne qualité aux
citoyens."
|