Une puissance d'analyse unique
Les chercheurs ont pu compter sur plus de 500 personnes du
sud du Québec provenant de 24 grandes familles élargies,
chacune d'elles comptant au moins deux personnes atteintes de
la maladie de Paget. "Ça nous donne une puissance
d'analyse génétique qui est presque unique au monde",
estime Jean Morissette. Ces personnes ont été recrutées
par l'entremise du médecin Jacques Brown qui soigne les
personnes atteintes de la maladie de Paget.
Les analyses du type "tour du génome" ont permis
aux chercheurs d'identifier deux nouveaux locus où se
terre un gène associé à la maladie de Paget.
Nancy Laurin, Jacques Brown, Annie Duchesne, Yves Lacourcière,
Vincent Raymond et Jean Morissette du Centre de recherche du
CHUL et leurs collègues Arnaud Lemainque, Denys Huot,
Gervais Drapeau et Jean Verreault publient les conclusions de
cette recherche dans le numéro de septembre de la revue
scientifique American Journal of Human Genetics.
Bien que très fréquente, la maladie de Paget demeure
largement méconnue. Elle vient pourtant au deuxième
rang des maladies de l'os les plus communes, juste derrière
l'ostéoporose. La maladie de Paget est caractérisée
par un remaniement intense et anarchique du tissu osseux qui
provoque des douleurs et des déformations de la colonne
vertébrale, du bassin, du fémur et parfois même
du crâne. Ces symptômes se manifestent la plupart
du temps après 40 ans et seulement 5 % des personnes atteintes
en souffrent suffisamment pour que leur état nécessite
des traitements.
Il existait déjà deux locus soupçonnés
d'abriter un gène lié à la maladie de Paget.
L'un d'eux est très contesté et l'autre ne semble
pas être en cause dans les cas retrouvés au Québec,
observe Jean Morissette. Tout comme la plupart des maladies héréditaires
dominantes, plusieurs gènes et plusieurs mutations pourraient
être en cause dans la maladie de Paget. "Si on parvenait
à identifier un premier gène, on pourrait étudier
quels mécanismes sont perturbés et on découvrirait
peut-être un facteur commun entre plusieurs mutations",
avance le bioinformaticien.
Il existe déjà des médicaments qui permettent
de bien contrôler la progression de la maladie de Paget,
mais ils ne s'attaquent pas à la cause du problème.
"En identifiant des gènes responsables, nous pourrons
dépister les personnes à risque, mieux comprendre
l'étiologie de la maladie et permettre la mise au point
de médicaments ciblés vers les mécanismes
défectueux, espère Jean Morissette. Ça pourrait
même avoir des retombées sur notre compréhension
de l'ostéoporose."
JEAN HAMANN
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