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20 septembre 2001  |
Tête pleine, bon dos?
Le diplôme universitaire agit-il comme un vaccin contre
les maux de dos? C'est ce qu'on serait porté à croire
en prenant connaissance des conclusions d'une vaste analyse qui
établit un lien étroit entre la prévalence
des maux de dos et la scolarité. Cette étude, réalisée
par Clermont Dionne, professeur au Département de réadaptation,
et par cinq de ses collègues américains, révèle
une prévalence plus élevée de maux de dos
chez les personnes moins scolarisées. "Ça ne
signifie pas qu'il existe un lien direct de cause à effet
entre les maux de dos et l'éducation, précise d'entrée
de jeu Clermont Dionne. Par contre, le fait qu'on observe un gradient
continu entre les deux variables indique bien qu'il se passe quelque
chose, que la scolarité est un marqueur significatif."
Évidemment, il saute à l'esprit du commun des mortels
que les risques de maux de dos sont moins grands chez les personnes
qui enseignent le piano que chez celles qui les déménagent.
"Dans notre étude, nous avons tenu compte de l'occupation
professionnelle des sujets et de la charge physique de travail,
explique le professeur. Même en standardisant pour ces facteurs,
l'association entre la scolarité et les maux de dos subsiste.
Une partie des maux de dos s'explique par la charge physique de
travail, mais, de toute évidence, ça n'explique
pas toute l'histoire."
L'équipe de Clermont Dionne, qui publie le fruit de ses
analyses dans un récent numéro du Journal of
Epidemiology and Community Health, a passé en revue
64 études sur les maux de dos et la scolarité, publiées
entre 1966 et 2000. Selon les chercheurs, la prévalence
de maux de dos plus élevée chez les personnes moins
scolarisées s'expliquerait, en partie, par des épisodes
de douleurs lombaires plus longs. "Pour le moment, le lien
entre scolarité et mal de dos est une boîte noire.
Si on parvenait à comprendre comment les deux variables
sont liées, ça nous aiderait à identifier
les causes des maux de dos et à mieux soigner ceux qui
en souffrent." Les hypothèses considérées
pour expliquer les problèmes de dos chez les personnes
moins scolarisées font état de prédispositions
physiques créées par le milieu socio-économique,
de l'accès plus difficile aux soins de santé, d'une
moins bonne adaptation au stress, d'un moins grand respect des
directives à suivre pour éviter les maux de dos
ou pour les soigner ou encore d'interactions moins profitables
avec les professionnels de la santé.
Épidémie
"Le mal de dos est un problème tellement courant
qu'on a l'impression qu'il est bien compris, mais ce n'est pas
le cas, souligne Clermont Dionne. On commence à peine à
en saisir toute la complexité en dépit des coûts
énormes qu'il engendre pour la société."
Environ 80 % des adultes vont souffrir de maux de dos à
un moment de leur vie, le plus souvent entre 35 et 55 ans. Les
douleurs à la colonne vertébrale sont la deuxième
cause de consultations médicales aux États-Unis
après les maladies respiratoires comme le rhume et la sinusite.
Les coûts directs et indirects engendrés par les
maux de dos dans ce pays dépassent 100 milliards de dollars
américains par année, poursuit Clermont Dionne.
"Au Canada, les organismes provinciaux de santé et
sécurité au travail dépensent annuellement
plus de deux milliards de dollars en frais médicaux, en
frais de réadaptation ainsi qu'en compensations financières
pour le mal de dos. "Les dépenses associées
au mal de dos augmentent plus rapidement que pour tout autre cause
d'incapacité. Il n'est pas du tout exagéré
de parler d'épidémie", soutient le chercheur.
Le mal de dos est maintenant reconnu par la communauté
scientifique comme un problème de santé lié
à plusieurs facteurs autant physiques et biologiques que
psychologiques et sociaux, ajoute Clermont Dionne. Tout comme
la scolarité, des facteurs tels l'environnement psychosocial
de travail, les antécédents médicaux, le
tabagisme, la sédentarité et le fait d'avoir de
jeunes enfants favorisent les maux de dos. Cependant, insiste-t-il,
aucun de ces facteurs ne peut expliquer à lui seul la prévalence
actuelle de ce problème de santé.
JEAN HAMANN
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