6 septembre 2001 |
La réunion du Conseil universitaire du 4 septembre a permis de connaître les noms des deux corécipiendaires 2001-2002 du Prix d'excellence en enseignement de l'Université Laval. Il s'agit de Jean-Claude Filteau, professeur à la Faculté de théologie et de sciences religieuses, et de Jean-Paul Laforest, professeur titulaire et directeur du Département des sciences animales à la Faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation. Cette récompense institutionnelle est décernée chaque année par le Réseau de valorisation de l'enseignement. Une bourse individuelle de 10 000 $ l'accompagne.
J'ai deux amours
Jean-Claude Filteau prendra sa retraite dans quelques mois.
Durant sa longue carrière, son enseignement aura reposé
sur deux piliers: l'amour de ses étudiants et étudiantes,
et l'amour de la Bible et de son histoire. Des premiers, il dira:
"Ce que j'ai toujours voulu leur transmettre, c'est un plaisir
de la découverte qui les rende autonomes et créateurs."
Quant à la Bible, il insiste sur le caractère unique
de ce livre qui a profondément marqué notre civilisation.
À ses débuts à l'Université Laval,
la Faculté de théologie traversait une grave crise.
Pour continuer à exister, elle se devait d'innover, tant
en recherche qu'en pédagogie. Sur ce dernier point, la
contribution de Jean-Claude Filteau allait être remarquable.
À preuve, ce témoignage de son collègue Alain
Faucher qui, à l'automne 1971, entreprenait son baccalauréat
en théologie. "J'ai été à la
fois sidéré et séduit par la virtuosité
pédagogique et technologique du jeune professeur Filteau,
raconte-t-il. Révolutionnaire pour l'époque, il
arriva dans un cours d'histoire de l'Église (matière
conservatrice s'il doit en être une!) muni de deux rétroprojecteurs
et de deux projecteurs à diapositives. L'heure qui suivit
fut pour moi un intense moment de ravissement. Le contenu coulait
de source, les exemples visuels fusaient."
Dans leur analyse, les membres du jury du Prix d'excellence n'ont
pas manqué de souligner le développement continuel
de nouvelles formules pédagogiques, ainsi que la grande
variété de stratégies d'enseignement dont
a fait preuve le professeur Filteau durant sa carrière.
Par exemple, il fut en 1984 l'un des pionniers au Québec
en matière d'enseignement à distance avec son cours
télévisé sur l'histoire de la littérature
biblique. (Il travaille actuellement à la refonte de ce
cours pour le Canal Savoir.) Il a aussi été l'un
des premiers à organiser dès 1979 des voyages d'études
dans les pays bibliques.
Un bricoleur dans l'âme
Peu de gens savent que Jean-Claude Filteau a un réel
talent de maquettiste. Il n'est que d'examiner l'impressionnante
maquette exposée dans le hall du pavillon Félix-Antoine-Savard
pour s'en convaincre. Cette reconstitution à l'échelle
1:250 reproduit le second temple de Jérusalem érigé
au premier siècle de notre ère. "Je suis un
peu un visuel, dit-il. Quand j'ai vu une chose, je la comprends.
Vous allez trouver que je fais un mauvais théologien! Du
monde qui parle de choses qu'ils n'ont jamais vues, c'est bien
nous autres! Au fond, si je n'avais pas choisi la théologie,
j'aurais aimé être architecte."
Jean-Claude Filteau n'a pas fait qu'enseigner tout au long de
sa carrière. Il fut entre autres directeur de l'ensemble
des programmes de théologie et vice-doyen aux études
de sa faculté. Il a aussi consacré cinq ans à
la fonction d'ombudsman.
Communicateur hors pair, dynamique et enthousiaste, professeur
attentif, chaleureux et disponible, érudit, vulgarisateur
et intellectuel curieux, Jean-Claude Filteau est aussi un être
généreux. "À la veille de sa retraite,
il a accepté d'être mon directeur de recherche pour
l'obtention du grade de maître en théologie, indique
l'étudiante Cécile Nadeau. Cela montre qu'il s'agit
d'un professeur assez spécial."
Sur le Prix d'excellence, le professeur Filteau se considère
chanceux de recevoir pareille marque de reconnaissance en fin
de carrière. Il trouve également plaisant de mériter
cette récompense avec un jeune collègue. "J'ai
aimé travailler dans le milieu universitaire, dit-il, c'est
un extraordinaire lieu de liberté pour un professeur."
Une année faste
L'année 2001 sera à marquer d'une pierre blanche
pour Jean-Paul Laforest, lui qui recevait plus tôt cette
année de sa faculté le prix Paul-Gervais pour l'excellence
en enseignement. Le jury du prix d'excellence institutionnel a
retenu le fait qu'il enseigne à tous les cycles en plus
de dispenser des cours en formation continue. C'est aussi un chef
de file, tant au niveau départemental que facultaire, sur
le plan de la pédagogie. Il reçoit de très
bonnes évaluations de ses étudiants et étudiantes.
De plus, il encadre plusieurs de ces derniers aux cycles supérieurs.
"Je suis éclectique, explique le lauréat, j'aime
expérimenter différentes choses. La décision
d'accepter une tâche administrative reflète un peu
mon côté contestataire. Si on veut que les choses
changent, on peut rester à l'extérieur et crier
très fort, ou aller dans l'arène et se battre. J'aimais
mieux aller dans l'arène."
Jean-Paul Laforest l'admet sans détour: il aime trop l'enseignement.
En devenant directeur de son département, il a donc réduit
sa tâche de recherche. "J'ai beaucoup plus de plaisir
à transmettre des connaissances, à les vulgariser
à d'autres, qu'à en faire l'acquisition moi-même",
indique-t-il. Pourtant, il n'en a pas toujours été
ainsi. En 1981, alors qu'il entreprenait ses études de
deuxième cycle, le métier de professeur n'occupait
qu'une petite place dans ses objectifs de carrière. Jusqu'au
jour où son directeur de recherche à la maîtrise
lui demande de monter un cours de six heures. Cette expérience,
plus qu'une révélation, fut un véritable
coup de foudre. "Les étudiants ont bien accueilli
mon cours, raconte-t-il, et cela a eu un effet déclencheur."
Un professeur-acteur
Selon Jean-Paul Laforest, l'étudiant aura du mal à
digérer un enseignement qui ne s'attarde qu'au contenu.
En ce sens, il affirme qu'un professeur doit se comporter en acteur
qui cherche à conquérir le coeur et l'esprit de
son public. "Il ne faut pas seulement meubler le temps lorsqu'on
donne un cours, explique-t-il, il faut aussi meubler l'espace."
L'étudiant en agronomie Étienne Gosselin est tout
à fait d'accord. En classe, le professeur Laforest donne
un véritable spectacle au cours duquel il bouge, gesticule
et parle, tout en jouant avec le ton de sa voix. "Son but
est évident, dit-il. Il veut maintenir l'attention des
étudiants. Et ce but est toujours atteint à voir
toutes les paires d'yeux qui le suivent."
Transparents ou diapositives, exposés oraux ou présentations
Power Point, projection de films ou de vidéocassettes,
Jean-Paul Laforest aime varier ses méthodes pédagogiques.
"Il ne faut pas oublier que les étudiants ne viennent
pas juste assister à ton cours, indique-t-il. Ils vont
trouver le temps long si on ne leur donne pas une certaine diversité."
Il affectionne particulièrement le tableau et la craie
qui permettent, selon lui, beaucoup de mouvements et qui créent
une certaine ambiance. Il aime aussi sortir du cadre rigide scientifique
classique et provoquer des échanges sur des sujets controversés
(ex.: le bien-être animal, l'environnement versus la production
porcine, la maladie de la vache folle, etc.).
Communicateur né, vulgarisateur remarquable, homme de défis
dynamique et passionné, professeur enthousiaste, disponible
et innovateur, Jean-Paul Laforest est un universitaire engagé
qui multiplie les activités de participation, notamment
sur le terrain auprès des associations de producteurs.
"Jean-Paul donne un très bel exemple de ce que doit
être un agronome face aux producteurs, soit un mélange
de connaissances techniques, d'entregent et de diplomatie, précise
son collègue François Pothier. En outre, il voulait
absolument ce poste de directeur pour bien brancher la réalité
du milieu agricole avec celle de l'Université."
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