5 avril 2001 |
En 1670, Molière donne, à Versailles, la première représentation de son Bourgeois gentilhomme devant le roi Louis XIV et sa cour. Près de quatre siècles plus tard, on monte encore cette "comédie-ballet" qui s'inscrit dans la lignée classique des oeuvres mettant en scène, d'une époque à l'autre, et d'une culture à l'autre, la quête sans fin des personnages désirant s'élever au-dessus de leur condition. La troupe des Menus plaisirs, fondée l'an dernier et qui rassemble des étudiants et des professeurs du Département d'histoire, présentera ce grand classique du théâtre français les 13, 14 et 15 avril, à 20 h, à l'Amphithéâtre Hydro-Québec du pavillon Alphonse-Desjardins. Comme la musique occupe une place de premier choix dans cette pièce en cinq actes, cinq musiciens et quatre chanteurs, sous la supervision d'André Papillon, de la Faculté de musique, se joindront à la vingtaine de comédiens qui défileront sur scène. Harmonies baroques, grand déploiement de costumes et rires sont au rendez-vous.
L'envie du Mamamouchi
Bourgeois entiché de noblesse, monsieur Jourdain, interprété
par Étienne Gendron, entend acquérir les manières
des gens de qualité. Il décide d'abord de commander
un habit plus digne d'une personne de condition et se lance dans
l'apprentissage des armes, de la danse, de la musique et de la
philosophie, autant de choses qui lui paraissent indispensables
à sa nouvelle condition de gentilhomme. Il courtise également
la marquise Dorimène, amenée sous son toit par son
amant Dorante, un comte désargenté qui profite de
la naïveté de Jourdain. Ce comte lui promet notamment
l'anoblissement en échange d'argent. Madame Jourdain et
Nicole, sa servante, se moquent, puis s'inquiètent de le
voir ainsi toqué de belles manières, et tentent
de le ramener à la réalité. Entre-temps,
Cléonte lui demande la main de sa fille, mais comme ce
dernier n'est pas gentilhomme, il refuse obstinément cette
union. Covielle, le valet de Cléonte, imagine alors de
déguiser le jeune homme en fils du Grand Turc et de l'introduire
chez le bourgeois pour l'honorer et lui offrir la distinction
de "Mamamouchi", un soi-disant titre de noblesse. Une
comédie se joue alors à ses dépens.
Au XVIIe siècle, en France, ne devenait pas noble qui le
voulait, fait remarquer Geneviève Gendron, la metteure
en scène. "Dans la société très
hiérarchisée de l'époque de Molière,
la notion du "chacun à sa place" prévalait.
À chaque niveau social correspondait notamment un mode
de vie, des couleurs de vêtements et un type d'habitation.
Ces barrières très perceptibles entre les classes
ne se franchissaient pas facilement. C'est pourquoi, dans cette
pièce, ceux qui côtoient Jourdain se moquent allègrement
de ses prétentions, dont ses maîtres qui le jugent
avec pitié et ne voient en lui qu'un parvenu." Ce
bourgeois ne réussit donc qu'à se couvrir de ridicule
en étalant au grand jour son ignorance de la civilité
et des belles manières.
Riche, prétentieux et très crédule, Jourdain
se fait berner sur tous les plans. Pour s'anoblir, il est prêt
à débourser une fortune. Il achète, par exemple,
un habit ridiculement orné simplement parce que le maître
tailleur lui assure que les nobles en portent de semblables. "D'ailleurs,
il suffit de lui dire que les personnes de qualité le font
ou en ont pour qu'il délie avec joie, au grand dam de son
épouse, les cordons de sa bourse, fait valoir Geneviève
Gendron. Ceux qui gravitent autour de lui le savent et en profitent.
Jourdain, lui, n'y voit que du feu." Comme à son habitude,
Molière attribue donc ici à la femme des qualités
supérieures, soit l'intelligence et la lucidité,
et fait de l'homme un pauvre niais, afin d'en rire un peu.
On peut se procurer des billets pour assister à cette grande
mascarade et se moquer gentiment de Jourdain, ce bourgeois qui
prétend au titre de gentilhomme, au coût de 6 $ en
prévente, au Service des activités socioculturelles,
au local 2344 du pavillon Alphonse-Desjardins, ou les soirs de
représentations, au coût de 8 $. Renseignements:
656-2765.
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