29 mars 2001 |
COMPRENDRE LA COMPLEXITÉ À L'UNIVERSITÉ
"Je remercie Robin Fortin d'avoir assumé la mission
bien québécoise de brise-glace, d'avoir oeuvré
pour une oeuvre qui se voue à lutter contre les myopies
et aveuglements d'une connaissance qui se croit toute lucidité,
alors qu'elle est incapable d'affronter les défis vitaux
et mortels du nouveau millénaire" - Edgar Morin.
Robin Fortin, philosophe, vient de publier, aux Presses de l'Université
Laval, Comprendre la complexité. Cet ouvrage
s'inscrit dans la collection "Sociologie contemporaine"
dirigée par Daniel Mercure, du Département de sociologie.
Robin Fortin, diplômé de la Faculté de philosophie
de l'Université Laval, enseigne au Collège de Limoilou.
Sa thèse de doctorat porte sur la pensée complexe
d'Edgar Morin, qu'il a eu l'occasion de rencontrer à quelques
reprises. Il a fait une analyse en profondeur de La Méthode
qui apporte un éclairage nouveau sur l'oeuvre d'Edgar
Morin. À travers l'oeuvre de Morin, l'auteur nous invite
à une remise à jour de nos notions et nos concepts
les plus fondamentaux. La complexité est le problème
auquel font face toutes les sciences aujourd'hui, Edgar Morin,
dans La Méthode, nous aide à comprendre la
complexité; il nous en dévoile les principes, les
exigences, les enjeux, les difficultés. L'éminent
penseur montre que la connaissance de la complexité commande
une nouvelle approche et une réforme de la pensée
qui devraient intéresser en premier lieu les universitaires.
Comprendre la complexité nous encourage à
superposer à notre pensée disciplinaire, réductrice,
une pensée complexe, englobante. C'est le seul espoir d'arriver
à comprendre et à solutionner un jour les nombreux
problèmes de plus en plus complexes auxquels fait face
l'humanité. Ce livre me paraît incontournable dans
la conjoncture mondiale et universitaire actuelle. Si je le recommande
si fortement, c'est que j'ai personnellement perdu, au cours des
six dernières années, un temps fou à cause
d'un mode de pensée et d'administration disjonctif et parcellaire,
caractéristique de la structure et de la mentalité
universitaires. J'ai eu la témérité comme
éducateur de proposer un jour un programme de développement
humain, transdisciplinaire de par sa nature même. Morin
combat depuis plus de 20 ans ce cloisonnement et cette fragmentation
qui sont devenus des obstacles majeurs à l'avancement de
la science et à la solution des problèmes planétaires
de l'humanité. La lecture de Comprendre la complexité
est un excellent moyen, très peu dispendieux, de diminuer
nos myopies et nos aveuglements d'intellectuels spécialisés.
QUI POURRA DONC ATTERRIR EN DOUCEUR?
Il y a quelques jours, je recevais un important courriel du
vice-recteur exécutif et un peu plus tard une invitation
à consulter la convention de développement institutionnel
et le contrat de performance sur le site Web de l'Université
Laval. Quelle ne fût pas ma stupéfaction de constater
que le déficit allait continuer de gonfler jusqu'en 2002-2003,
malgré le refinancement gouvernemental, pour atteindre
un montant astronomique de 133 000 000 $. Cette stupéfaction
fit rapidement place à un sourire lorsque j'ai lu que l'Université
allait atteindre ses objectifs budgétaires et que l'atterrissage
allait se faire en douceur par une élimination progressive
du déficit jusqu'en 2018!
Je me suis mis à calculer le plus simplement possible l'impact
de cet énorme déficit sur nos activités universitaires.
J'ai donc estimé à au moins 15 000 000 $ le coût
annuel en intérêts et en remboursement de la dette
pendant ces 15 prochaines années.
Pour les professeurs, le remboursement de ce déficit signifie:
l'embauche de 150 professeurs de moins, donc d'environ 12 % du
corps professoral, ou une réduction de rémunération
de 12 %, soit d'environ 8 000 $ par an pendant 15 ans, ou un
effort additionnel de 5-6 heures par semaine, soit 2 soirées
ou un samedi pendant 15 ans, ou une diminution d'environ 20 000
000$ en subventions de recherche par année pendant 15 ans
et une réduction de revenus d'enseignement pour un montant
équivalent par an pendant 15 ans, ou...
Pour les étudiants, le remboursement du déficit
équivaut à: une augmentation de 600 $ des droits
de scolarité par an pendant 15 ans pour chaque étudiant,
ou des réductions de la qualité de l'enseignement
pour un montant équivalent pendant 15 ans, ou des groupes
de 60 au lieu de 50 étudiants pendant 15 ans, ou l'abolition
de 2 500 charges de cours par an pendant 15 ans, ou
la fermeture de la bibliothèque pendant une décennie
et demi, ou.
Je n'ai pas estimé l'impact du déficit sur le personnel
non-enseignant, mais il est également considérable.
Comme vous le voyez, les choix sont très variés.
On peut même concevoir des "cocktails" de contributions
pour mieux faire "avaler le poisson ". Peu importe le
"combo", il en résulte une indigestion! Cette
situation m'attriste profondément, car mon Université,
ma Région, mon Pays souffriront pendant au moins deux décennies
de ce catastrophique déficit. Mais qui pourrait bien atterrir
en douceur? Posez la question, c'est y répondre.
UNE NATION JUSQUE DANS LE VERBE
Beaucoup de gens s'imaginent que nous, citoyens de la Francité,
ne pouvons utiliser la majuscule dans la notation des sites et
des adresses électroniques. Or si pour l'heure il est en
effet impossible de pratiquer les signes diacritiques (les accents,
le tréma, la cédille, etc. - ce qui du reste
ne saurait tarder si tant est que la francophonie décidât
enfin, ne fût-ce que par égard pour elle-même,
de cesser en la matière de demeurer à la remorque
des manières plutôt tyranniques de l'angloétatsunisation
ambiante), en revanche la lettre capitale reste tout à
fait la bienvenue dans le créneau de la communication par
voie électronique.
Aussi, et ce en stricte cohérence avec le discours droit
et franc de M. Bernard Landry, pourquoi ne pas libeller les multiples
adrélecs de l'ensemble du réseau gouvernemental
de manière à accorder pleinement toute leur valeur
- ô combien précieuse pour toute société
civilisée - aux symboles de l'écriture? Car
ces graphèmes totalement "émasculés"
des adresses électroniques par "interdiction tacite"
et parfaitement injustifiée de l'utilisation de la majuscule
atteste, de fait, un comportement que l'on peut qualifier d'inadmissible
au sein d'une grande administration publique (la semonce conserve
assurément sa pertinence à l'égard d'une
institution comme l'Université Laval). Ainsi, puisque le
Québec n'est pas une "commune chose" (c.-à-d.
"un québec", comme on dirait "une chaussure",
pourquoi ne pas orthographier systématiquement l'appellation
comme suit: cpm@cex.gouv.Qc.ca (en l'occurrence, l'adrélec
du cabinet du Premier ministre) plutôt que de cette façon:
cpm@cex.gouv.qc.ca (ou mieux encore: CPM@Cex.gouv.Qc.ca)? Autres
illustrations: Ministre@Mss.Gouv.Qc.ca ou Ministre@Justice.gouv.QC.ca,
etc.
J'imagine que ce n'est pas madame Annette Paquot, professeure
au Département de langues, linguistique et traduction,
et collaboratrice toujours empressée de Cité
libre (périodique de grande envergure intellectuelle,
comme chacun sait), qui ici me contredira...
Dans la langue française, comme en bien d'autres idiomes,
l'usage de la majuscule ne constitue pas un geste anodin et sans
signifiance. Si en effet "québec" n'est pas une
province (auquel cas il se verrait sémantiquement habité,
comme il se doit, par... des provinciaux), ainsi que l'affirme
avec force et non sans raison le chef de l'État québécois,
l'allographe "Q" dans l'abréviation "Qc"
ne se révèle-t-il pas en conséquence plus
que jamais incontournable? Ah! quel "bonheur citoyen"
ce serait de voir cette graphie "qc", minusculisante
et réductrice (sinon asservissante et dans tous les cas
indigne), enfin extirpée des milliers d'adrélecs
de l'ensemble des correspondances de l'administration des ministères
et des organismes publics du Québec...
Libérer la capitale en Capitale, c'est, je crois, déjà
franchir le Rubicon depuis la lettre jusqu'à l'Esprit.
Et qui sait - si peu que nous le voulions vraiment - jusqu'à
la Liberté même.
|