29 mars 2001 |
Avec les produits de masse interchangeables comme le papier
journal et la planche de bois résineux communément
appelée "2 par 4", l'industrie québécoise
des pâtes et papiers obtient beaucoup de succès.
Elle aurait toutefois intérêt à se tourner
progressivement vers les produits à valeur ajoutée,
dits de seconde transformation, qui sont l'aboutissement d'une
démarche de recherche et de développement ( R &
D). En effet, le marché du papier journal a atteint sa
maturité et celui du bois d'oeuvre résineux, utilisé
dans la construction résidentielle, perd de plus en plus
de terrain face à des matériaux de substitution
tels que le ciment et l'acier.
Robert Beauregard, professeur au Département des sciences
du bois et de la forêt, a prononcé une conférence
le lundi 12 mars au pavillon Alphonse-Desjardins dans le cadre
de la onzième Journée colloque Kruger. Cette journée
avait pour thème: "La seconde transformation, un avenir"
et comptait parmi les événements au programme de
la trente-deuxième édition de la Semaine des sciences
forestières.
"Nous sommes reconnus comme des leaders en productivité",
affirme le professeur Beauregard. Il cite en exemple le géant
mondial québécois Abitibi-Consolidated. En 1999,
cette société a produit 6,3 millions de tonnes de
papier journal contre 3,3 millions de tonnes pour son principal
concurrent européen, la Scandinave Stora-Enso. En revanche,
dans le marché en croissance des papiers fins, Stora-Enso
a produit, la même année, 6,1 millions de tonnes
comparativement à 1,8 million de tonnes pour Abitibi-Consolidated.
"Stora-Enso, dit-il, a une stratégie très diversifiée
au niveau papetier, avec un accent sur le papier à valeur
ajoutée."
Niche et flexibilité
Robert Beauregard insiste sur deux stratégies alternatives:
la niche et la différenciation des usines de sciage. Par
exemple, une société finlandaise, Korhonen Oy, fabrique
les meubles Artek, des produits de luxe faits de bouleau finlandais
vendus dans six magasins exclusifs à travers le monde.
"Une chaise Artek, souligne-t-il, coûte 80 dollars
américains à produire et se vend 8 000 dollars.
L'idée derrière la niche est qu'une clientèle
très sélecte va payer une fortune pour vos produits.
Les gens achètent le design. Plus la niche est petite,
plus c'est payant."
En sciage, plusieurs usines finlandaises et suédoises utilisent
une seule essence, comme l'épinette ou le pin. "Celles
qui utilisent du pin, ajoute-t-il, si elles sont trois, vont se
spécialiser en billes de pied, de cime ou du milieu afin
de servir de façon différenciée les marchés
qui ont des exigences particulières. Ainsi, les billes
de cime vont servir aux lamelles de poutrelles vendues aux Japonais."
Selon le professeur Beauregard, la fonction de R & D deviendra
d'autant plus cruciale dans l'avenir que la dynamique de création
de produits de seconde transformation ira en s'accélérant.
"Le contreplaqué industriel, présentement dans
sa phase de maturité, aura peut-être vécu
40 ans avant d'atteindre sa phase de déclin, explique-t-il.
On peut penser que le panneau de particules, qui est dans sa phase
de croissance rapide, vivra peut-être 15 ans avant son déclin."
Depuis décembre dernier, Robert Beauregard pilote un important
projet de chaire industrielle vouée aux produits en bois
d'ingénierie structuraux et d'apparence. Si le projet aboutit,
l'approche d'ingénierie consistera à mettre au point
des produits moins chers et plus performants, notamment des poutrelles
plus rigides et des parquets plus stables. Pour cela, on utilisera
des procédés novateurs productifs et des combinaisons
novatrices de matériaux bois et composites de bois.
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