15 mars 2001 |
L'ouverture d'un casino dans une région, considérée par plusieurs comme une planche de salut économique, ne fait pas que des gagnants. En effet, trois chercheurs
de l'École de psychologie viennent de démontrer
que l'ouverture du Casino de Hull a accentué tous les symptômes
annonciateurs d'une hausse du nombre de joueurs pathologiques
dans cette région.
Christian Jacques, Robert Ladouceur et Francine Ferland ont mené
deux enquêtes auprès de 457 personnes de la région
de Hull avant l'ouverture du Casino de Hull, en 1996, et un an
après. Pour fins de comparaison, les chercheurs ont répété
le même exercice auprès de 423 personnes habitant
la région de Québec, où aucun nouveau casino
n'a ouvert ses portes pendant la période d'étude.
Dans l'article scientifique qu'ils signent sur le sujet dans un
récent numéro du Canadian Journal of Psychiatry,
les trois chercheurs notent, pour la région de Hull, que
le pourcentage de personnes ayant fréquenté un casino
dans les douze mois précédant l'enquête a
grimpé de 14 % à 65 % (stable autour de 25 % à
Québec). Pendant la même période, le montant
maximum d'argent perdu en une journée est passé
de 89 $ à 155 $ (stable à près de 27 $ à
Québec). En un an, les Hullois ont dépensé
environ 251 $ dans leur casino, soit nettement plus que les 113
$ pariés par les Québécois dans les trois
casinos de la province.
Un an après l'ouverture du Casino, 28 % des répondants
de Hull connaissaient quelqu'un qui a un problème de jeu
contre 16 % à Québec. "Il s'agit d'une interprétation
subjective et non une évaluation psychologique, reconnaît
Christian Jacques, mais ces chiffres sont tout de même révélateurs.
La période d'étude était cependant trop courte
pour que l'on puisse véritablement détecter une
hausse significative du pourcentage de joueurs pathologiques dans
la population."
Changements sociaux
Environ 71 % des Hullois interrogés estimaient que
l'ouverture du casino avait provoqué dans changements sociaux
dans leur région. Parmi eux, trois sur quatre jugeaient
que ces changements étaient négatifs. D'ailleurs,
en un an, le pourcentage de personnes opposées au casino
est passé de 20 % à 29 % parmi les répondants.
La recherche menée par les trois psychologues de Laval
est la première à documenter l'évolution,
dans le temps, des pratiques de jeu d'une population à
la suite de l'implantation d'un casino sur son territoire. Les
chercheurs entendent répéter l'enquête dans
l'avenir afin de quantifier l'impact, à moyen et à
long terme, de l'ouverture d'un casino.
Selon les travaux réalisés par l'équipe de
Robert Ladouceur, le nombre de joueurs pathologiques a doublé
au Québec au cours des dix dernières années.
Les chercheurs expliquent cette hausse par le simple fait que
les occasions de jouer sont plus nombreuses.
|