22 février 2001 |
Dans le cadre du programme Alliances de recherche universités-communautés
(ARUC), le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada
vient d'accorder une subvention de 600 000 $ sur trois ans au
consortium Université de Montréal-Université
Laval pour le projet RÉSOVI (Les réponses sociales
à la violence envers les femmes). Ce projet s'insérera
dans les travaux de recherche menés par le CRI-VIFF (Centre
de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la
violence faite aux femmes), un organisme conjoint aux deux établissements
universitaires.
Dominique Damant, professeure à l'École de service
social de l'Université Laval et codirectrice du CRI-VIFF,
précise que la subvention facilitera le travail de recherche
du Centre. "Ce qu'il y a de particulier ici, explique-t-elle,
est que nous faisons un type de recherche qui se construit à
chacune de ses étapes avec les milieux d'intervention."
Le projet RÉSOVI s'intéressera aux diverses formes
de violence que peuvent subir les femmes et ce, à tout
âge et dans tous les contextes. Les réponses sociales
à ce problème se situeront au niveau de la promotion
de comportements non violents, la prévention et le dépistage
de la violence, et l'intervention auprès des victimes et
des agresseurs. Les équipes de recherche regrouperont des
spécialistes en sociologie, psychologie, criminologie,
service social, droit et éducation. Le CRI-VIFF développera
de nouveaux partenariats avec les secteurs de la justice, de la
sécurité publique et de l'éducation.
Une femme sur deux
En 1993, une enquête de Statistique Canada a révélé
qu'une femme sur deux, depuis l'âge de 16 ans, a été
victime d'au moins un acte de violence physique ou sexuelle commis
par un homme. La plupart du temps, les victimes connaissaient
leur agresseur avec qui, dans de nombreux cas, elles entretenaient
une relation intime.
Dominique Damant rappelle que lors de la création du Centre,
en 1992, les vocables CRI et VIFF pouvaient être associés
à la douleur vécue par de nombreuses femmes. "Il
est clair que la violence faite aux femmes fait mal, dit-elle.
Il y a cependant eu une évolution au niveau des réponses
sociales. Depuis 1995, il existe une politique du gouvernement
du Québec contre la violence conjugale. De l'argent a été
investi. Les mentalités ont changé. Aujourd'hui,
nous misons davantage sur la vie après la violence, sur
sa construction, sur l'espoir."
Cela dit, il reste beaucoup à faire. Certaines maisons
d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté
connaissent une situation financière précaire. Encore
aujourd'hui, des femmes se font tuer. Dans les cas d'agressions
sexuelles, les médecins, qui sont souvent confrontés
aux victimes, donnent l'impression d'être peu formés
en plus d'avoir tendance à culpabiliser ces dernières.
Dominique Damant indique que les agressions sexuelles n'ont pas
encore fait l'objet d'une prise de position sociale. Pour le séminaire
qu'il tiendra dans quelques semaines, le CRI-VIFF n'a pu trouver
un seul chercheur québécois dont les travaux portent
sur les femmes adultes victimes de tels actes.
Selon Dominique Damant, de jeunes garçons, témoins
de violence conjugale dans leur propre famille, peuvent être
portés à répéter ces comportements
plus tard. D'autre part, il y aurait un lien entre le mode de
socialisation masculin et la jalousie. Des inégalités
sociales structurelles, comme la question des salaires, joueraient
aussi un rôle dans la violence envers les femmes.
"L'élément de base sur lequel nous nous appuyons,
précise-t-elle, consiste à dire: aidons les petits
garçons et les petites filles à développer
des rapports égalitaires, à construire une société
égalitaire, et il y aura, à tout le moins, moins
de violence."
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